Rolihlahla Mandela
samedi, 07 décembre 2013
Rolihlahla Mandela s'est éteint avant-hier. Depuis hier, tout le monde souffle sur le feu de sa mémoire. De tout ce que j'ai lu et entendu, je veux déposer sur mes îles deux braises: le poème Invictus de William Ernest Henley dans lequel "celui qui vient poser des problèmes" a puisé, dit-on, sa force à Robben Island:
Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.
In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud.
Under the bludgeonings of chance
My head is bloody, but unbowed.
Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade,
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.
It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate:
I am the captain of my soul.
Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Noires comme un puits où l’on se noie,
Je rends grâce aux dieux quels qu’ils soient,
Pour mon âme invincible et fière,
Dans de cruelles circonstances,
Je n’ai ni gémi ni pleuré,
Meurtri par cette existence,
Je suis debout bien que blessé,
En ce lieu de colère et de pleurs,
Se profile l’ombre de la mort,
Et je ne sais ce que me réserve le sort,
Mais je suis et je resterai sans peur,
Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.
... et l'hommage de Christiane Taubira qui se referme sur ces phrases:
"J'ai envie de me réconforter moi-même, de me consoler. Et je me dis, quoiqu'il arrive, le monde qui a donné naissance à Rolihlahla "celui qui vient poser des problèmes" et n'a pu l'empêcher de devenir Madiba, malgré, malgré tant et tout, ce monde ne sombrera plus jamais dans l'ignoble et l'horreur. Mais je sais qu'en ce moment même, je me mens. Alors, désemparée, avec Pablo Neruda je cède:
"Si je pouvais pleurer de peur dans une maison abandonnée
Si je pouvais m'arracher les yeux et les manger
Je le ferais pour ta voix d'oranger endeuillé
Et pour ta poésie qui jaillit en criant
Parce que pour toi poussent les écoles
Et les hérissons s'envolent vers le ciel"
Repose en paix, Madiba. Nos cœurs, ton linceul."
15 commentaires
Merci aux poètes de parler pour nous, de nous parler de lui.
Oui, merci d'avoir donné la parole à ceux qui savent quoi en faire.
Souhaitons beaucoup de courageux qui viennent poser des problèmes!
@ Tania et Colo
Oui, le poème chérit les mots et en prend le plus grand soin.
C'est un homme qui m'a souvent inspiré et sa libération m'avait fait brailler de bonheur
"brailler de bonheur": superbe association de deux mots.
bel hommage
Comme la traduction perd l'image d'origine, "black pit from pole to pole" est loin du puits où on se noie.
Hier nous avons visité une exposition à la mémoire d'Anne Frank. Au moment de déposer un mot, avant de s'en aller, ma compagne a dit "plus jamais ça". L'ignoble et l'horreur peuvent encore venir en terreau favorable et c'est pour cela qu'il faut, comme Mandela, la combattre et garder vigilance.
Oui tu as raison, la fosse noire et ses poteaux ont disparu.
L'ignoble et l'horreur poussent sur des terres desséchées et craquelées par "l'insupportation" de l'Autre, alors que la seule façon de vivre ensemble est de se porter secours, aide et tendresse.
... laughin' just to keep from crying ... chantait Barbecue Bob il est des voix qui portent à travers le temps et les continents.
... .
???.
grand vide.
.
R.I.P.
Oui qu'il demeure en paix, lui qui a tant oeuvré pour elle.
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