COMMENT J'AI PÊCHÉ ULYSSE
samedi, 04 août 2007
Il y a de cela quelques minutes, par désoeuvrement ou plus exactement par désir de faire oeuvre -toute modeste soit-elle, quelque chose comme un billet ou un post- je relisais l'à-propos de mon blog dans lequel j'affirme en toute fausse innocence ce qui suit :
Soudain, il me semble plus simple de pointer sur la carte IGN (0519 OT) du Finistère Sud toutes les failles de la côte, d'y rajouter toutes les îles - souvenirs épars de ces cassures qui narguent le continent - que de dénombrer mon archipel. Bien rusé celui qui dira ce qu'est la Littérature jeunesse ou ce qu'elle n'est pas : la présence de l'étiquette "à partir de tel âge" saura-t-elle suffire ? Il est vrai que dans La Littérature, aucun livre n'a jamais été estampillé d'un "à partir de quarante ans" ! Que faire alors de ces éditeurs dits jeunesse qui se sont toujours refusés à toute discrimination de type poussins-benjamins-cadets, quant aux seniors s'abstenir ? Alors quoi ? La présence d'illustrations ? La notion d'album ? La simplicité d'un récit ? Autant d'écueils à éviter.
J'ai dit bravo à l'Education Nationale le jour où elle a eu l'audace de faire entrer dans les programmes de 6ème L'Iliade et L'Odyssée. Deux pierres angulaires désormais dites "jeunesse"!
Il est un genre qui se fiche de tous ces questionnements peut-être bien stériles: la poésie. Regardez les albums Mango : hétéroclites, du Moyen Âge jusqu'au slam. Il n'est jamais trop tôt pour faire l'expérience du poème, se rendre compte qu'en ce domaine le sens unique n'existe pas, ni le sens interdit, d'ailleurs.
Lire un poème, c'est accepter à la suite du poète de cheminer dans l'inconnu. Nul besoin d'être un marin chevronné pour prendre ce risque. Accepter de ramasser sur la plage, Algues, sable, coquillage et crevettes, alors que nous espérions un poisson.
Lire, c'est accepter que les mots soient "en jeu", alors les frontières gardées par des doigts niais ne sont plus de mise. Si cette nuit, une femme lit quelque part Les treize tares de Théodore de Susie Morgenstern tandis qu'une collégienne finit Au bonheur des dames, il ne m'en faut pas plus pour sourire.
J'en étais là de mes pensées itinérantes et je ne savais plus trop où les faire aboutir. En attendant un sursaut de ma muse, j'ai tapé la date d'ouverture de mon blog, le 16 juin, dans Wikipédia. Ce n'est autre que le Bloomsday qui est apparu, les fameuses vingt-quatre heures de Léopold Bloom, le 16 juin 1904, racontées par Joyce dans Ulysse. Or ce roman est pour moi un continent à lui tout seul. Combien de fois en ai-je commencé la lecture ? Combien de fois ai-je tenté de le déjouer en prenant un chapitre au hasard ? Si sur celui-là seulement, on pouvait mettre "à partir de trente-huit ans", je courrais le chercher dans ma bibliothèque...
5 commentaires
J'ai eu beaucoup de plaisir à fréquenter quelques temps Ulysse (ou plutôt Ὀδυσσεύς ) mais j'ai eu beaucoup de mal à apprécier "Ulyssses" de Joyce que j'ai lu en entier. Peut-être étais-je trop jeune ? ;-)
Je ne crois que l'âge soit un frein à l'envie de lire: enfant, on peut lire des livres dits "adultes", comme on peut se plonger avec délices dans un livre "d'enfants" en tant qu'adulte.
Il suffit d'être avide de mots qui nous font voyager.
Micheline: Tiens donc de retour dans la blogosphère? Super!
J'adore ton nouveau billet, pas uniquement parce qu'il y a Algues, sable, coquillage et crevettes, d'ailleurs je vais le relire, je pense qu'on peut le lire moult fois sans pour autant avoir fini de le lire, j'ai bien rigolé, et comme le soleil et l'air doux d'un matin d'été l'accompagnent, forcement, ce fut un grand moment.
"de retour" euh...je repars ;-)
J'ai lu, ou pas lu, Ulysse comme toi, en l'ouvrant au hasard, lecture en interstices, en fragments, lecture effilochée en sable entre les doigts...
Les commentaires sont fermés.