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jeudi, 12 juin 2008

CRAPAUD ET OGRESSE

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Quelle saison était-ce donc hier soir? 23h, sortie de cinéma, le jour n'a pas envie de remballer si tôt et il persiste encore quelques instants.  On en oublierait presque d'allumer les phares au moment de reprendre la route. Quelques minutes avant, c'était encore -déjà- l'hiver, quelque part entre le 23 décembre et le 1er janvier.

Conte de Noël...

Le corps, plusieurs jours, a rechigné à aller voir un tel titre et l'été qui est à portée d'ongles. Il se doutait bien -Rois et reines- que ce ne serait pas Il était une fois et Ils eurent beaucoup d'enfants et vécurent heureux. Qu'a donc lu Desplechin avant de tourner son dernier film? On veut bien croire qu'il y eut un roman La greffe mais alors juste pour la genèse car toujours ce qui se trame et se détrame dans cette épopée en huis clos, ce sont les mythes, premières expirations littéraires -tout s'y joue en condensé concentré de la violence de la condition humaine- et Desplechin n'en finit pas d'y revenir. La mémoire s'épuise à tirer tous les fils, on croit pouvoir se poser sur une strate et déjà une autre se découvre. En une version courte, faux semblant du conte, cela donnerait:

Il était une fois Abel et  Junon qui eurent quatre enfants: Joseph, mort à six ans faute d'une greffe de moëlle, Elisabeth la seconde, promue donc au rang d'aînée très jeune, Henri conçu parce qu'on espèrait que sa moëlle serait compatible et Yvan, fragile et optimiste benjamin.

Mais les cartes sont brouillées et les dés pipés. Abel, drôle de patriarche hilare devant sa face de crapaud -cacherait-elle un prince?- n'a pas de Cain. Par contre entre l'aînée -telle une Antigone qui n'en finit pas d'enterrer son frère mort- et le cadet se joue une guerre fratricide où faute de tuer on bannit. Et puis, il y a la mère et le rejet de ce fils inutile, Henri. L'on pense à Junon et sa haine pour cet enfant de Jupiter qui n'est pas le sien, Hercule. D'ailleurs Henri se plaît à s'imaginer le fruit d'amours extraconjugales. Hercule meurt brûlé par la tunique enduite du sang du centaure Nessos. Dans Conte de Noël, Junon risque de mourir brûlée de l'intérieur si son corps rejette le don de moëlle d'Henri. Elle aussi est atteinte d'une leucémie et pour se sauver l'ogresse est prête, en une dévoration symbolique du fils haï, à reprendre ce qu'elle a mis au monde.

Conte de Noël au printemps, la neige a la chaleur de la plume échappée lorsque violemment l'oreiller se répand.