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samedi, 31 janvier 2015

Fragments hétéroclites

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Contrainte de passer ce début de semaine sous la couette, agrippée par la grippe, j'ai vécu par intermittence. Quand je réussissais à m'extraire d'un état d'abattement, j'ai regardé, épisode après épisode, le documentaire de William Karel et Blanche Finger, Jusqu'au dernier, la destruction des juifs en Europe. Se remémorer cette terrifiante machine qui fait que l'impensable est un jour pensé, élaboré et exécuté froidement, découvrir aussi certains rouages effroyablement huilés par le silence de ceux qui n'ont pas voulu voir.

Jeudi, j'ai retrouvé l'énergie d'aller vivre à temps plein. C'est toujours une période mouvementée que la fin du mois de janvier dans les collèges et lycées. La DHG tombe et dans le collège lambda où je bosse - entendez par là qu'il n'est pas REP ou REP+ - l'équipe des profs tombe souvent des nues, même si notre surprise d'année en année a tendance à s'émousser. Une fois encore, la Dotation Horaire Globalisée est peau de chagrin : elle va nous contraindre à lâcher des projets, faute d'heures pour les mettre en place. Pourtant j'avais cru comprendre qu'après le chaos que nous venions de traverser, l'Education Nationale était devenue une priorité pour de vrai. J'y avais presque cru : depuis quelques semaines, les journaux télévisés, les matinales des radios, tous cherchaient avidement le prof à interviewer. Une fois le spécimen attrapé, ils le sommaient de répondre à cette question : avez-vous conscience de l'importance de votre mission?

Hier, après un dernier cours, j'ai traîné sur les réseaux. J'y ai glané deux hashtags  #Ahmed8ans et #PayeTonEcoleRaciste et le site du gouvernement Stop-Djihadisme : le numéro vert sur la page d'accueil, qui le composera? Des parents d'enfants embrigadés, en détresse, sans doute. Des hommes et des femmes qui soupçonnent leurs voisins musulmans d'être des djihadistes, peut-être.

Parvenue à cette dernière ligne, je devrais peut-être songer à changer le titre de mon billet.

 

jeudi, 24 octobre 2013

Patience

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Patient, patience,
Patience dans l’azur!
Chaque atome de silence
Est la chance d’un fruit mûr!
Paul Valéry

En me levant ce jeudi matin, j'avais la ferme intention, avant de filer sur Paris, d'aller lire les textes de mes biobios, un itinéraire d'une carte du réel à une carte de l'imaginaire et le passage de l'une à l'autre sous une voie ferrée. L'intention s'est évaporée quand je me suis souvenue que justement nous étions jeudi: à mon retour, il ne me serait plus possible d'écouter Hubert Reeves parler de son dernier essai Là où croît le péril... croît aussi ce qui sauve dans La Grande Librairie du 17 octobre. J'ai bu chacune de ses paroles. Une pensée humaniste et poétique. Science et patience.
Face à lui d'Ormesson, imbuvable.

jeudi, 12 septembre 2013

Trois points de ...

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D. a récupéré dans les cartons d'une vieille cousine, il y a quelques temps, les lettres du Poilu A. Durand, brancardier, 2ème bataillon, 153ème d'Infanterie, 20ème corps d'armée, en campagne.  Une fois ces lettres en sa possession, D. n'a pas voulu  les consigner une 2ème fois dans des casiers de l'oubli. Elle a proposé à une collègue et prof d'histoire d'en offrir une lecture à haute voix à ses classes. Proposition déclinée pour cause de programme surchargé, conseil donné de les transmettre aux Archives! D. n'a pas voulu les archiver. Elle attendait qu'une autre occasion se présentât.
Cet été, elle est venu faire un tour sur mes îles, le jour du billet Tangage et tangente. Elle y a lu qu'E. préparait à sa manière et avec son accordéon une remontée à la surface de la guerre de 14, en marge des commémorations officielles et certifiées conforme à la pensée étatique. Elle m'a demandé si je pensais que. Si je croyais que ça pourrait l'intéresser.
Avant qu'elle ne les lui envoie, moi, mon carnet et mon crayon à papier, nous sommes passés chez elle pour les lire. Pour en garder une trace. J'ai tourné les pages, noircies elles-aussi au crayon à papier.  Dans chacune ou presque, un homme qui cherche à dissimuler le soldat. Pour rassurer son oncle et sa tante. Il est bien plus loquace quand il parle des colis reçus, chocolat et caleçons.
Avant qu'elles ne partent en terre pictavine, j'ai recopié quelques lignes.

23 novembre 1914
"Cette guerre dépasse en horreur tout ce qu'on peut imaginer."
16 décembre 1914
"C'est en vain qu'une horde de barbares nous inonde de sa ferraille, il n'y a plus que les morts qui n'avancent plus."
10 mars 1915
"Ne vous souciez pas des zeppelin; les chutes de cheminées sont plus dangereuses les jours de grand vent"
"Je suis un oiseau de nuit, je ne travaille que dans les ténèbres, silencieux comme une ombre."
16 avril 1915
"Ne nous emballons pas, nous avons encore du travail à faire et tous ceux qui l'ont commencé et continué ne l'achèveront pas."

Après plus rien. Cassandre malgré lui. La correspondance s'arrête là...

samedi, 04 mai 2013

Transformons nos territoires en immense potager!

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Ce jour-là, la cinémathèque de Paris et son expo Jacques Demy n'ouvraient qu'à midi. Du temps à improviser qui m'a conduit tout droit dans un espace improbable et renversant: le parc de Bercy et sa maison du jardinage. Y glaner une heure et laisser là-bas la file d'attente s'allonger.
Aujourd'hui, les Colibris appellent à multiplier ces espaces improbables dans les rues de nos villes.

samedi, 20 avril 2013

Alea jacta est ou quand rien ne se passe comme prévu.

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Hier la biquetterie était vide ou presque. Les unes étaient parties pour le Sud et les autres n'étaient pas encore rentrés de Touraine. Ne restaient plus que la tenancière de ces lieux et Zic avec son gros ventre qui ballotait de droite à gauche au moindre déplacement.
Je me réjouissais d'avance de cette journée dans laquelle j'allais pouvoir me lover comme bon me semblait. En l'occurrence, j'avais décidé de prendre à bras le corps la préparation d'un stage au titre tout aussi effrayant que vaste: "Articuler les différentes composantes du cours des Langues et Cultures de l'Antiquité". Commencer par remplir l'espace du bureau pour désagréger cette sensation désagréable de terra incognita: poser une tasse de café, ouvrir des classeurs et des onglets sur la toile, garder le paquet de tabac à une distance raisonnable. Rapprocher une feuille blanche et un stylo.
Mais quand les dés sont jetés rien ne saurait les abolir.
Zic s'est soudain agitée, accompagnant ses déplacements de miaulements nouveaux. J'ai eu beau lui expliquer qu'elle ne pouvait pas me faire un coup pareil, que je n'y connaissais rien en matière d'accouchement félin, que ma morveuse qui veut devenir sage-femme ne rentrait que le lendemain, qu'elle devait au moins aller dans l'établi où nous lui avions disposé un coin douillet, elle a résolument filé à l'étage et a installé ses flancs contractés dans un tas de tissus, non loin de la machine à coudre.
Ce que j'ai fait le reste de la journée ressemble à ça: déplacements désordonnés de mon bureau à l'étage -déjà deux de sortis- de l'étage à mon bureau -mettre en lien les langues anciennes avec la langue française- retourner à l'étage -le 3ème est apparu mais reste inerte dans sa poche, le placer sous le museau maternel- rejoindre mon bureau -mettre en lien les langues anciennes avec les cultures de la Méditerranée. Oui, reconstruire Carthage- remonter et textoter fébrilement à une copine qui s'y connait: comment sait-on que c'est fini? Redescendre et m'étonner d'avoir oublié ma tête là-haut. Aller la récupérer et admirer l'expulsion du 4ème.
J'ai su alors qu'elle en avait fini. Je me suis assise à même le sol et ai longuement regardé le quatuor se déhancher maladroitement vers les mamelles. Me suis dit que Zic avait agi avec une grande confiance face à cette terra incognita. Le soir venu, j'ai retrouvé ma table de travail et ai tranquillement agencé ce qui le matin me semblait un paquet de noeuds inextricables.

samedi, 27 février 2010

CARNAVALESQUE

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Carnaval de Nice

Monsieur La Fontaine s'est trompé.
Ai croisé une grenouille qui pour égaler le boeuf en grosseur s'est enflée, enflée si bien qu'elle est montée.

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dimanche, 19 octobre 2008

RIRE EST LE PROPRE DE L'HOMME

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Je reviens d'une drôle de rencontre où l'on parla de Babeth 1ère, de Riton IV et de Poléon. D'aucuns appellent cela une conférence. Jugez par vous-même. Mettez à une même table, certes imposante, dans une salle, certes dite de conférence, une Dame pétrie d'humanisme et une réincarnation Brueghelo-Dumassienne, dixit la Dame à ses côtés. La Dame se nomme Béatrice Fontanel et derrière la double réincarnation se cache Ours gris. Laissez-leur le temps de conférer -l'une l'oeil pétillant et le verbe humble, l'autre hilare et le poil hirsute- et vous obtiendrez un échange truculent autant dire rabelaisien.

Ces deux-là étaient venus nous parler de leur Histoire de France dessinée pas encore -à peine?- sortie chez Gallimard. L'Histoire avec sa grande hache, ils s'y étaient déjà frottés avec Riton IV et Babeth 1ère. Et moi à les entendre parler,  j'ai regretté de ne pas avoir qu'une poignée d'années au compteur. Le Monde, j'aurais aimé le rencontrer par le biais de leurs plumes et miquets. De -750 à 1968, double page après double page, il leur a fallu sélectionner des tranches de saucisson (1), réincarner des événements pétrifiés par leur célébrité sans céder à la tentation de seulement les resucer pour les recracher ensuite, trouver dans cette matière odeurs et couleurs. Parce que raconter l'Histoire, cela passe aussi par l'anecdote, ils nous ont dit Saint Louis le cul par terre sous son chêne, Jules et ses rouflaquettes qui avait inscrit les noms des parents récalcitrant à l'éducation nationale sur la place publique, Charlemagne et son éléphant -était-il indien ou africain?-, la chaleur terrifiante de la Saint-Barthélémy, le froid des maisons au Moyen-Âge et la houppelande, tenue de mise pour traîner chez soi.

Lorsque vous regarderez les illustrations de l'Ours, n'oubliez pas que le moindre centimètre carré a été au préalable documenté, vérifié, digéré puis aquarellisé. A chaque fois, d'un semi-remorque plein, il a dû garder une brouette.Lorsque vous lirez les textes de la Dame, souvenez-vous que sa maxime est: il n'y a rien de plus émancipateur que d'apprendre quelque chose chaque jour. Entre la prose de l'une et les illustrations de l'autre, il est une matière que vous ne pourrez pas lire mais que peut-être vous sentirez en tournant les pages. L'Ours, à chaque expédition d'un nouveau miquet par les tuyaux d'internet direction Gallimard, s'est laissé aller à des textes défoulatoires. La Dame s'est laissée aller à dialoguer avec eux. Ils circulent actuellement sous cape ouverte à tous vents. En voici quelques passages.

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Après avoir donné ses armes à César Jules , Vercingétorix est couvert de chaînes, puis il est  invité  a un voyage organisé vers Rome.  Dans cette belle cité, il va participer au grand triomphe de Jules et pour que la fête soit complète, le même Jules le fera étrangler dans le bungalow où il était
hébergé.César t’es un salop, ton fils aura ta peau! Je vais aller faire un tour chez les gallo-romains.
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1347 Les rats arrivent à Marseille et débarquent avec la peste dans les bagages. Le bacille va faire une tournée grandiose!
Tiguidiguidi voilà la grande peste!
Tiguidiguidi tout’l’monde  râle et crêve!
Tiguidiguidi  elle rentre partout!
Dans les palais dans les taudis!
Tiguidiguidi elle franchit  mêm’les limites du pays!!
Allez pour vous remonter le moral faut pas oublier qu’il y a  une guerre de cent ans sur le feu! Quand les pestiférés auront réchappé au bacille ils seront bons pour aller faire le soldat, ou subir les soldats.

Vercingétorix, la grande peste, les têtes coupées gaillardement au moment de la révolution parce qu'elles étaient bon marché, tout cela fait partie de notre histoire. Mais que dire alors de celle qui est encore chargée de souvenirs, de celle sur laquelle encore nous sommes assis. Dire aux enfants d'où ils viennent, cela revient à dire l'histoire de leurs arrière-pépés et arrière-mémés. A la question "par quelle illustration avez-vous commencé?", l'Ours ne cherche pas ses mots, rejette du revers de la main un begaiement: celle de la Shoah. L'illustration, je vous laisse aller la découvrir dans leur livre. De ce qu'il en dit l'Ours pour se défouler, je vous laisse le lire...

Ben moi ça me met le moral à zéro cette soirée diapo qui a commencé avec la “grande” guerre qui faisait partie des récits des grands pères et qui se termine avec l’arrivée des cousins pieds-noirs, des harkis avec leurs cabanes dans la forêt et des gros cons qui organisaient  des “ratonnades”. Ce qui est coincé entre n’est pas reluisant, quel sandwich!
Une chance, les prochaines pages sont sur mai 68, les rêves ne dureront pas, d’accord, ça fera feu de paille mais le temps que le feu aura brûlé on aura vu clair…

Au moment de refermer ce billet, je m'en voudrais d'avoir parlé de tout cela sans jamais évoquer le gallicé. L'ours l'avait peintuluré mais Gallimard l'a ignoré. Qu'à cela ne tienne...

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(1): la tenancière des Îles Indigo a toujours rêvé de noter mot pour mot la gouaille de l'Ours. Assise dans la salle de conférence, elle en a abusé et retranscrit ici quelques entrechoquements de mots doux à son imaginaire. (ndlr)

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dimanche, 08 juillet 2007

D'AILLEURS

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Enfants d’ici, parents d’ailleurs
Histoire et mémoire de l’exode rural et de l’immigration
Carole Saturno, Gallimard Jeunesse



Je veux me souvenir de cet inventaire pas tout à fait à la Prévert
De tous ceux qui un jour ont dû
Partir
Bretons Auvergnats Alsaciens Antillais Guyanais
Quitter
Ashkénazes
Faire bagages
Russes blancs
Dégager
Arméniens apatrides
S’engager pour la der des der
Africains Spahis Tirailleurs sénégalais indochinois du Tonkin ou d’Annam Goumiers Malgaches
Emigrer
Gueules noires Ritals
Se décoloniser
Séfarades
Emigrer pour travailler travailleurs immigrés
Maghrébins Catalans Portugais Bidonville de Champigny
Décamper
Serbes Bosniaques Kosovars Turcs Kurdes
Lever l'ancre et le camp
Boat-people, Sans-papiers, camps de Sangatte
Je veux me souvenir
De tous ceux qui un jour ont dû
Extirper leurs racines là-bas
Pour s’enraciner
Ailleurs, Ici

A Mamie Courgette dont le regard se perd parfois au-delà de l’horizon méditerranéen…