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mercredi, 17 juillet 2019

Une bête au Paradis, Cécile Coulon

cécile coulon

Agapé
 Festival des jardins, Chaumont sur Loire

Une bête au paradis, commencé un soir de juin et fini l'après-midi suivant au fond de mon hamac, juste avant de partir au Festival des Jardins de Chaumont sur Loire dont le thème cette année est "Jardins de paradis". J'avais même prévu un billet qui se serait appelé Un week-end aux Paradis.
Les jours qui ont suivi ne m'ont pas laissé l'espace pour écrire : l'année à finir, la suivante à projeter, mes jardins -celui devant la biquetterie et le potager derrière- à embellir pour qu'ils aient quand même une gueule de Paradis malgré la canicule, la table, le soir, qui ne désemplit pas, tout ce qui s'y est dit et qui emplit les pensées longtemps après, L'empreinte d'Alexandria Marzano-Lesnevich et les jours à Arradon.
Pendant tout ce temps, Une bête au paradis est resté sur le muret en briques de la cuisine. Chaque jour m'éloignant un peu plus de ma lecture. Qu'allait-il en rester?
J'ai gardé vide aujourd'hui, entre un retour et un départ; je me suis assise à la table de la cuisine; le roman devant moi. Il m'a suffi de le feuilleter pour que tout ressurgisse.
Le Paradis et sa fosse aux cochons. Attachés à ce lieu en un lien inextricable, Émilienne, ses petits enfants - Blanche, c'est elle la bête, et Gabriel puisque tout Paradis a son ange -  et le commis Louis puisque tout Enfer a son cerbère. Gravitant autour, Alexandre, le conquérant du coeur de Blanche. Cela commence comme une tragédie antique avec un prologue où tout est dit : Blanche se tenant au milieu de la fosse à cochons, un bouquet de fleurs rouges à la main comme on se tiendrait devant une tombe. Reste à dérouler une machine implacable d'où ne surgira aucun dieu in extremis. La fatalité s'enfle et se gonfle d'autant plus que les personnages se pensent libres. Remarquable !
Chapeau bas, mamzelle Tête d'Or !

15:10 Publié dans ROMAN | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cécile coulon |  Facebook |

mercredi, 15 mai 2019

Biffure 65

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© Pili Vazquez

en mon corps les fibres de la nuit
sur mes paumes les coupures de la clarté

Biffure de la page 129 de Le tour de l'oie d'Erri de Luca

dimanche, 12 mai 2019

Biffure 64

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Soudain
l'après-midi se rompt
le souvenir s'ouvre
comme un mouchoir
et la contraction funeste
s'éparpille dans les herbes

Biffure de la page 76 de Les os des filles de Line Papin

samedi, 04 mai 2019

Biffure 63

459.jpg

© Pili Vazquez

Devant moi
son visage
son sourire
et quelques secondes de silence
dans l'air

Biffures de la page 95 de Partiellement nuageux d'Antoine Choplin

mercredi, 01 mai 2019

Biffure 62

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Arrêter les nuits
sans sommeil
des transports en commun
imprimer
sur mes lèvres
le goût de l'instant infini

Biffures de la page 265 d'Amour minuscule de Térésa Radice et Stefano Turconi

jeudi, 11 avril 2019

Les gratitudes de Delphine de Vigan

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© Nicole Farizon

J'étais dans cet entre-deux inconfortable. J'avais fini la veille Les confidences. Je ne savais à quel nouveau livre me confier. Une pile attendait au bord de mon lit. Je n'osais y toucher. Il y a quelque chose d'intransigeant en moi dans ces moments-là. Il faut que le suivant soit à la hauteur du précédent. Et souvent le suivant en pâtit.
J'en étais là de mon indétermination quand j'ai vu que C. avait oublié Les gratitudes sur la table dans le salon. Je n'ai jamais rien lu de Delphine de Vigan jusqu'au bout. Sur France Inter, dans la semaine, les premières lignes en boucle m'avaient fait grimacer : "Vous êtes-vous déjà demandé combien de fois dans votre vie vous aviez réellement dit merci ? "
Tant qu'un livre en pâtisse, autant que ce soit celui-là ! Commencé en début de soirée, il s'est opposé à la nuit jusqu'à la dernière page.
Bien sûr, les pleins et les déliés de Michka, l'ancienne journaliste qui est parvenue à la presque fin de sa vie et perd inexorablement ses phrases. Grand-mère des mots tordus. Bien sûr, Marie, sa fille de coeur. Mais surtout Jérôme, l'orthophoniste de l'EHPAD ; ses exercices pour faire barrage aux mots qui fichent le camp ; les murs qu'il a dressés entre lui et son père, son silence depuis si longtemps.
Bien sûr, les failles, les fêlures, les fractures de ces trois-là. Mais surtout l'interstice qui s'ouvre là.

IMG_20190402_205717.jpg

09:13 Publié dans ROMAN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : delphine de vigan |  Facebook |

dimanche, 07 avril 2019

Les confidences de Marie Nimier

marie nimier

 C'est un peu comme si vous alliez à une séance chez votre psy, à ceci près que jamais vous ne voyez son regard et elle le vôtre. C'est un peu comme si vous alliez à confesse, à ceci près que vous ne vous confessez pas mais vous confiez, que vous n'avez pas dix Ave Maria à réciter à la sortie mais sans doute l'envie étonnée de dire Ave Marie !  De toute façon, le titre Les confessions n'était plus libre.
Et Les confidences est un mot tellement plus doux pour dire cette écrivaine qui, dans un appartement meublé a minima -deux chaises, une table, un philodendron sur parquet flottant et une patère- reçoit, les yeux bandés, des anonymes venus là pour raconter remords et regrets à vif que le temps n'a su apaiser, rêves et fantasmes.
Matière vive récoltée jour après jour. Puis ruminée.
"Faut-il vraiment que j'avale toutes ces choses qu'on me raconte ? Et non seulement que je les avale, mais que je les rumine pendant la nuit ? (...) L'écrivain tient de la vache. Combien d'heures lui faut-il pour métamorphoser un carré de prairie en un litre de lait ? Passer du solide au liquide, du vert au blanc... Dans sa grande lenteur, la vache tourne et retourne sa langue. Écrire est une histoire de temps. "
J'ai lu Les confidences, l'une après l'autre. Avec lenteur. M'obligeant à n'en découvrir qu'une par soir, à laisser la gorgée de lait se transformer en moi pendant la nuit. Et au réveil, toujours cette interrogation : si j'étais allée dans l'appartement meublé a minima, qu'aurais-je raconté ? Hier, j'ai tourné la dernière page. Ce matin, je me suis dit que, oui, c'est sans doute cela que j'aurais tenté de dire : l'émotion abrupte et à vif, l'été dernier au Bout du Monde, devant un colosse blanc, la tendresse contenue dans ses mains enveloppant celles de sa fille et leurs regards à tous deux portant loin. Le tremblement de mes mains, ce jour-là.

 

11:29 Publié dans ROMAN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marie nimier |  Facebook |

mardi, 26 mars 2019

Biffure 61

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Pompéi, mars 2019

Soudain
un arbre gigantesque
caresse
d'une feuille alanguie
le drap de la nuit
il pressent l'aube

Biffures de la page 126 de Vie et mort en quatre rimes d'Amos Oz

vendredi, 15 mars 2019

Biffure 60

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Le Havre, août 2018

Sème
sous les pensées
du matin
une langue ardente

Biffures de la page 19 de La guerre des pauvres d'Eric Vuillard

14:04 Publié dans BIFFURES, ROMAN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le havre |  Facebook |

jeudi, 14 mars 2019

biffure 59

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Les Coquets, février 2019

dans ma mémoire patibulaire
la beauté tranquille
de son regard clair

Biffures de la page 49 de Rendez-vous à Parme de Michèle Lesbre

12:34 Publié dans BIFFURES, ROMAN | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : lune |  Facebook |

vendredi, 08 mars 2019

biffure 58

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Noyant, février 2019

Déplier la tête vers l'extérieur
Regarder la silhouette d'une bise
au-delà de la terre
de sa propre histoire
attacher de l'importance
à un empilement de pierres
à une incroyable immensité
t'y attendre
debout dans le silence

Biffures de la page 298 de Les étoiles s'éteignent à l'aube de Richard Wagamase

dimanche, 03 mars 2019

biffure 57

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Le Pariou, février 2019
© Pili Vazquez

La force de l'arbre
se répercutait
dans les battements de mon coeur
bouillonne d'une rive à l'autre
me disait-il

Biffures de la page 209 de Sauvages de Nathalie Bernard

mercredi, 20 février 2019

biffure 56

léonor de recondo

Le Pariou, février 2019

On entend aujourd'hui
le fond qui ondule
en caresser la veine vibrante
un parfum de peau
nous enveloppe
le sculpter dans
mon imagination

Biffures de la page 114 de Manifesto de Leonor De Recondo

vendredi, 04 janvier 2019

L'art de perdre

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Père et fille
Le Havre, décembre 2018

"Lorsqu'elle ouvre les yeux après une soirée trop arrosée (elle a dû les espacer davantage, elle ne pouvait supporter qu'il s'agisse d'une misère hebdomadaire, encore moins bihebdomadaire), la première phrase qui lui vient à l'esprit est :
je ne vais pas y arriver."

L'art de perdre d'Alice Zeniter


Je pensais que ce serait le dernier roman lu en 2018 et quel roman! Mais je ne suis pas arrivée à le finir avant de refermer l'année. Pourtant ce n'est pas faute d'avoir essayé. Des débuts d'après-midis avec le café qui s'allongent jusqu'à la tombée du jour, des nuits sans sommeil et des petits matins encore blafards sous la couette à lire à perdre haleine, coupée de tout le reste ou presque : parce qu'il y a eu ma machine à laver qui a rendu l'âme et qu'il a fallu partir en quête d'une nouvelle, parce qu'il y a eu des m3 d'eau qui se sont évaporés dans le jardin et qu'il a fallu comprendre comment colmater la fuite, parce qu'il y a eu le projet de ma fille de passer le 31 à la biquetterie et qu'il a fallu mettre un peu d'ordre avant de prendre la route pour la côte normande. J'ai glissé L'art de perdre dans mon sac, je me voyais lire face à la mer. Mais face à la mer, nous avons couru le matin, randonné l'après-midi sans perdre pied. Quant aux soirées, elles étaient éperdument compères.
Je pensais que ce serait le dernier roman lu en 2018 mais c'est finalement le premier roman fini en 2019 et quel roman !

"Elle n'est arrivée nulle part au moment où je décide d'arrêter ce texte, elle est en mouvement, elle va encore."

17:47 Publié dans ROMAN | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : fabien mérelle |  Facebook |

dimanche, 23 septembre 2018

Biffure 50

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Roquebrun, juillet 2018

trouver les gestes pour saisir
le jour indigo lisière
entre
la pluie délavée et le soleil blanchi
entre
les parcours troués du cosmos
et la carcasse malingre des passerelles

Biffures de la page 197 d'Un monde à portée de main de Maylis de Kérangal

samedi, 01 septembre 2018

Biffure 49

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Gr 21, Juin 2018


La voix de mes pensées
souffle sur ses yeux-sourire
passe au-dessus de ses cheveux si bien tournés
et se met à rire en un clin de seconde

Biffures de la page 1(2) et 234 de 4321 de Paul Auster

17:41 Publié dans BIFFURES, ROMAN | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : paul auster |  Facebook |

mardi, 07 août 2018

Biffure 46

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Blanhac, juillet 2018
© Antoine Farizon

Nous nous souvenons de jours clairs
épinglés au milieu des roses obliques
petits cailloux amassés
réserves
pour les années suivantes
pour passer la vie en marche
derrière un océan

Biffures de la page 44 de Les jours clairs de Zsuzsa Bank. Merci à la libraire des Petits papiers d'Auch pour ce conseil de lecture, récit porté par une écriture lumineuse.

mardi, 10 juillet 2018

Mise en abyme abyssale

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Par une journée très chaude, trop chaude pour aller courir, se réfugier sous l'ombre du cerisier, dans le transat, pour se poser un peu, en attendant que le soleil soit à nouveau fréquentable, en profiter pour lire Petit éloge du running de Cécile Coulon. Mais par littérature interposée, se retrouver à enfiler ses baskets, grimper le long du sentier qui mène au panorama, transpirer suer cracher se moucher avec les doigts, réveiller d'anciennes douleurs et être à nouveau au pied du mur !
A la dernière page, je croyais être arrivée au bout de mes joies. C'était sans compter sur le portail qui soudain s'ouvre sur l'auteur en tenue de running -ou était-ce de jogging ou encore de footing?- en os et en chair rouge mais à peine essoufflée par la côte et qui lance : c'est ici le ravitaillement thé à la menthe ?
Aujourd'hui, le soleil est moins chaud mais j'ai bien envie d'essayer quand même : se réfugier dans le transat sous l'ombre du cerisier, en profiter pour relire Autoportrait de l'auteur en coureur de fond d'Haruki Murakami et attendre le grincement du portail de fer forgé.

 

dimanche, 18 février 2018

Prix du Meilleur Roman Points Poche (2)

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2ème chronique pour le Prix Points Poche

Souvent quand je commence la lecture d'un nouveau roman, je file un cocon-silence, au coin de la cheminée, dans un recoin de mon jardin, au pied de ton poirier, dans les replis de mon hamac ou dans les plis de ton canapé. C'est selon, en fonction des saisons. Absente au monde, à ma propre vie pour mieux y revenir. Parfois au contraire, je choisis la vitre d'un TGV, exposée à l'espace qui défile, je trace ma route de ligne en ligne.
Mais dès les premières pages d'Une bouche sans personne, j'ai su que ces espèces d'espaces n'allaient pas convenir. J'ai quitté mon village perché sur les coteaux - ce jour-là, les poubelles s'entassaient sur le trottoir, les rippers, le matin, n'avaient pas bravé la tempête de neige- ai passé le pont et suis entrée au bistrot. Me suis installée à une table, contre une vitre, sous un rayon de soleil, ai commandé un premier café. Je pouvais enfin passer l'après-midi à lire Une bouche sans personne, en une mise en abyme parfaite.
J'ai écouté son narrateur se raconter soir après soir dans le bistrot de Lisa, après ses journées de comptable, faire le conte de ses souvenirs, les siens et celui de son grand-père. Tout d'abord pour ses amis puis pour une assemblée trop imposante pour le bistrot trop étroit. Garçon, un 2ème café s'il vous plaît. Il n'y a pas grand monde cet après-midi là, un jeune qui boit une bière, le regard perdu dans son verre et deux femmes qui se chuchotent au-dessus de leur chocolat. Je l'ai écouté descendre le long de sa blessure, celle qu'il dissimule derrière une écharpe. Avec pudeur, repoussant toujours plus loin le moment où il faudra dire jusqu'à l'indicible. Garçon, un verre de rouge, s'il vous plaît. Quand j'ai tourné la dernière page, il faisait nuit depuis longtemps.
J'ai pris la route du retour, ai franchi le pont, ai remonté les coteaux, ai longé l'alignement des poubelles. Penser à commander à mon libraire Une rose et un balai de Michel Simonet. Chemin faisant, je ne savais pas encore que le lendemain, je commencerais, au coin du feu, la lecture de Six degrés de liberté de Nicolas Dickner, que je le trouverais drôle puis perdant de son humour, que je me laisserais la liberté de l'abandonner pour commencer Eroïca de Pierre Ducrozet, que je me dirais, tiens j'ai changé de roman mais le personnage principal s'appelle toujours Jay.

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samedi, 20 janvier 2018

Branche éplore

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Acte 1 : En 1957, Italo Calvino écrit Il barone rampante, où le jeune Côme décide de monter dans l'yeuse de son jardin et de ne plus en descendre. Le monde vu d'en haut.
Acte 2 : Trois ans plus tard, ce texte est traduit en français : Le baron perché.
Acte 3 : Soixante ans plus tard, Claire Diterzi n'ayant pu obtenir les droits sur ce texte intitule son spectacle L'arbre en poche.
Acte 4 : Mardi soir, nous allons voir ce spectacle à l'Arsenal et découvrons que l'un est l'anagramme de l'autre, y compris l'accent devenu apostrophe.
Tu dis, oui, et alors ? Comment ça, oui et alors ? C'est génialissimement oulipien, cette histoire !!! Tu imagines, peut-être qu'Italo lui même ne savait pas que Le baron perché contenait L'arbre en poche.

13:38 Publié dans ROMAN | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : oulipo |  Facebook |

dimanche, 14 janvier 2018

L'invention des corps, Pierre Ducrozet

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Dimanche dernier, je me projetais tranquillement sur ma rentrée et envisageais de souhaiter à mes élèves de connaître la morsure d'un livre...
Je ne savais pas encore que le soir-même, c'est moi qui allais me retrouver mordue, soufflée comme une fenêtre par la tempête, estomaquée comme après un uppercut. Mes résolutions de refermer la journée tôt ont disparu dès le premier chapitre. J'ai lu loin dans la nuit. Le lendemain à la pause-clope, je n'avais que L'invention des corps à la bouche. Le mardi soir, pour la réunion Terres Parallèles, j'ai tout mis en oeuvre pour que mon enthousiasme soit contagieux. Toute la semaine, j'ai voulu l'accélération des jours pour reprendre de retour chez moi, oublieuse du tas de copies à corriger, la lecture de cet incroyable récit en rhizome qui se joue de la chronologie dans un monde en réseau, d'Iguala à la Silicone Valley, qui invente des univers sous la peau ou dans les câbles, qui place Bonnie and Clyde face à Frankenstein, qui fait renaître le désir dans le corps massacré puis augmenté d'Alvaro.
Jeudi matin, j'ai tourné la dernière page avec le premier café. Le ciel était gris et les contours de mon jardin estompés par une brume tenace. J'ai décidé de refaire les joints de ma salle de bain. En arrachant le silicone jauni, c'est encore à L'invention des corps que je pensais. Sur ma baignoire, j'ai posé mon ordi et ai écouté Pierre Ducrozet se demander : où en est-on dans nos corps en 2017 ?

vendredi, 12 janvier 2018

Prix du Meilleur Roman Points Poche (1)

prix points poches.jpg

En octobre, deux excellentes nouvelles tombaient : j'étais sélectionnée pour faire partie du jury du Prix du Meilleur Roman Points Poche dont la Présidente cette année est Lydie Salvayre ! Voici mes premières chroniques...

Histoire du lion Personne, Stéphane Audeguy

J'ai commencé ce roman par la dernière phrase: "Alors nul ne se souvint plus de Personne". J'ai souri. Ce lion de papier allait-il rentrer dans ma galerie de personnages inoubliables ou bien donnerai-je raison au narrateur? 
Je vous le dis sans détour, le lion Personne flanqué de son fidèle compagnon Hercule passant de mains en mains, de pays en pays, de St Louis jusqu'à Paris, des ports négriers jusqu'à la révolution française ne passera pas aux oubliettes. Je lui ai donné une place de choix dans ma galerie, aux côté d'Ulysse, même si ce Personne-là ne retrouvera jamais sa terre natale.
Cette histoire n'est pas une fable -silence des bêtes ; peut-être bien un conte philosophique comme une invitation à reconsidérer notre propre humanité.

Eclipses japonaises, Eric Faye

Ces derniers matins, quand la Corée du Nord a fait la une des journaux radiophoniques, Eclipses japonaises est réapparu dans mes pensées. Partant d'un fait réel -la volatilisation de Japonais à la fin des années 70, enlevés par des Coréens désireux d'infiltrer le pays du soleil levant- Eric Faye entrelace les destins de l’Américain Selkirk, des Japonais Naoko Tanabe, Setsuko Okada, Shigeru Hayashi en un roman choral. Se tisse alors une toile entre désespoir et résilience.
Même si j'ai trouvé que le roman s'essoufflait sur la fin, je garderai dans ma galerie Naoko qui contrainte et forcée de donner des cours à des Japonais, a la "sensation de se vider de sa langue maternelle comme de son enfance". Parfois l'envie de se rebeller l'effleure : "larder ses cours d'erreur, inculquer une incongruité, comme une bombe à retardement qui, un jour, ferait voler en éclats la vie de ces types. Elle se l'interdisait pourtant, en vertu de l'espoir inextinguible d'être renvoyée chez elle. Rendue à l'enfance."

Lucie ou la vocation, Maëlle Guillaud

Ce roman m'a semblé tellement mièvre -style et récit- que pour me consoler je suis allée relire quelques belles pages de Georges Bernanos.

Quant à Derniers feux sur Sunset de Stewart O'Nan, je l'ai laissé tomber après avoir lu les premiers chapitres et ai oublié de le ramasser.

 

 

20:15 Publié dans ROMAN | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : lydie salvayre |  Facebook |

mercredi, 10 janvier 2018

Biffure 37

nuits de rêve.jpg

© Pili Vazquez

Marcher chaque nuit
dans le lit des géants
valait mieux
que de vieillir en disant
"ça fera l'affaire"

Mots rescapés des biffures de la page 15 de Certaines n'avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka

samedi, 06 janvier 2018

Biffure 36

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Iles Chausey
©
Pili Vazquez

Avec les puzzles
de la vie
t'as l'impression que
la ligne brumeuse de la photo de la boîte
oublie
le souvenir posé sur la table

Mots rescapés des biffures de la page 87 de Bariloche d'Andrès Neuman

18:32 Publié dans BIFFURES, ROMAN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cairn |  Facebook |

mercredi, 27 décembre 2017

Biffure 35

brise lame.jpg

Brise lame de fond
St Malo

Ton journal
a paru se craqueler
sous sa carapace martelée
zakhor souviens-toi
un murmure que le temps tisse

d'une voie hésitante

Mots rescapés des biffures de la page 162 de Sobibor de Jean Molla

jeudi, 21 décembre 2017

Biffure 34

tenir la route.jpg

© Pili Vazquez
Tenir la route,
Aurillac août 2017

Entreprendre les kilomètres
sur le qui-vive ou sur une île
quand parlent les histoires
myriade du récit
prenons la nuit en marche

Mots rescapés des biffures de la page 11 d'Eclipses japonaises d'Eric Faye

 

mardi, 19 décembre 2017

Biffure 33

DSCN4958.jpg

A mi-chemin
étape de confort
parler à des êtres
bienveillants
et dormir
juste avant l'aube
qui attend
au coin de la route
pour croître

Mots rescapés des biffures de la page 113 d'Histoire du lion Personne de Stéphane Audeguy

mardi, 21 novembre 2017

Extravagance

souvenirs de marée haute.jpg

Iles Chausey, septembre 2017

 

"Quelque chose me dit que le vagabondage, la disponibilité ne vont pas de soi, qu'ils exigent pour se maintenir une vigilance et impliquent une discipline."


Souvenirs de la marée basse, Chantal Thomas

 

 

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lundi, 13 novembre 2017

La disparition de Josef Mengele, Olivier Guez

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Jean-Michel Fauquet
Musée de la photographie
Nice, octobre 2017

Il est des livres pour lesquels on sait bien que ce ne sera pas possible. Choisir une page, la biffer, en garder quelques mots et être satisfaite -plus ou moins- du palimpseste obtenu. Il est des livres pour lesquels ce geste de rature semble indécent.
La disparition de Josef Mengele fait partie de ces livres-là. Le médecin tortionnaire d'Auschwitz est dans toutes les phrases, tous les silences entre les lignes. Il y a quelque chose d'effroyable de se retrouver ainsi dans son intimité, dans ses pensées au fil de sa fuite en Amérique du Sud. Et autour de lui, le cercle de ses complicités.
On préfèrerait presque rayer les nuits qui suivent cette lecture, entrecoupées de réveils en sursaut, de ces nuits où le sommeil vous surprend les lunettes encore sur le nez, la lumière allumée et vous ballottent encore et toujours dans le roman. 
Au petit matin, on décide alors de laisser en guise de trace les deux dernières phrases.
"Toutes les deux ou trois générations, lorsque la mémoire s'étiole et que les derniers témoins des massacres précédents disparaissent, la raison s'éclipse et des hommes reviennent propager le mal.
Puissent-ils rester loin de nous, les songes et les chimères de la nuit ."

 

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dimanche, 05 novembre 2017

Biffure 32

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Nice, octobre 2017

Attendre l'inattendu
de ma chaise

je contemplais
le présent volubile
et obstiné à
dénouer les mots
et tisser
l'Odyssée
de nos pas

Mots rescapés des biffures de la page 68 d'Une Odyssée de Daniel Mendelsohn.

 

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