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dimanche, 05 mai 2013

Les mauvaises gens

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Hier après-midi, j'ai sorti le hamac, ai enfilé deux pulls et une grosse paire de chaussettes; sous un ciel gris, je m'y suis installée: l'espace était parfait pour lire un Davodeau en noir et blanc.

Ca se passe dans les Mauges, région traditionnaliste coinçée entre église et usine -certains historiens mal intentionnés prétendent que ce nom serait la contraction de "mauvaises gens".
Ca s'ouvre avec une scène de liesse au moment de la libération et se referme sur la joie de mai 81: entre les deux, Davodeau retrace le parcours d'un homme et une femme, syndicalistes et militants ouvriers, ses parents; il n'hésite pas à se mettre en scène, les mains et le crayon dans cette matière familiale qu'il fait remonter à la surface.

Je suis de la même génération que Davodeau. J'ai grandi, non loin de Paris, dans une ville royaliste coincée entre église et église. J'y ai poussé comme une mauvaise herbe qui cherche la tangente au milieu d'allées rectilignes. Je me souviens de la consternation paternelle quand Mitterand est devenu président.

Autant dire qu'en refermant Les mauvaises gens, je me suis sentie plus proche de cette enfance-là que de la mienne.

Parcours davaudien sur les îles indigo

 

vendredi, 18 janvier 2013

Fragments d'aujourd'hui raconté en recette de cuisine.

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Aujourd'hui, c'est vendredi. Journée de préparation des cours...
Videz votre sac. Prenez la pochette dédiée aux Biobios. Posez-la sur votre bureau. Ajoutez à ce début de pile, les classeurs de latin. Rajouter un ou deux livres. Le Gaffiot sera du meilleur effet. Si vous possédez en réserve Le Von Mopp, n'hésitez pas à le placer sur ce fragile équilibre. Il apportera indéniablement une touche pimentée à la préparation. Regardez le pain sur la planche d'un air satisfait, puis laissez reposer au moins deux heures.
Attrapez alors le T1 -ma reconnaissance éternelle plus un jour à M. qui l'a trouvé à l'Orielle hier en sortant du boulot- et le T2 de Lulu femme nue de Davodeau puis filez sous la couette pour les avaler.
Il peut se faire que le temps de repos de la pâte devienne soudain inutile. Par exemple, vous venez d'apprendre que la semaine prochaine vous êtes inspectée. Dans ce cas, abandonnez aussitôt les T1 et 2, vos envies de procrastination et malaxez énergiquement tous les ingrédients citez ci-dessus.

Au final, j'ai lu in extenso Lulu, femme nue, hier soir. Nouvelle baffe davodienne...

mardi, 15 janvier 2013

Aujourd'hui j'attends.

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La semaine dernière, je vous parlais de Un homme est mort. Un bouquin comme ça, on n'a pas envie de s'en remettre. C'est une baffe et on s'assure les jours suivants que la joue continue de brûler. Vendredi, je suis allée rafler à la médiathèque tout ce qui était estampillé Davodeau: Quelques jours avec un menteur, Rural!, Les ignorants, Les mauvaises gens et Lulu Femme Nue T2. Quant au T1, il n'est dans aucun bac et sur la carte d'aucun emprunteur. Disparu.Volatilisé.
J'attends de pied ferme le gougnafier qui a osé le piquer. Je lui laisse jusqu'à demain pour le ramener. Sinon, il ne perd rien pour attendre.

jeudi, 10 janvier 2013

Aujourd'hui livre posé.

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"Quand je pense à ceux qui se donnent tant de mal pour effacer certaines mémoires..." René Vautier
A peine avais-je posé cette bande dessinée-là, hier après-midi, que j'ai eu envie de la parcourir à nouveau. Me laisser dériver encore de planche en planche.
Brest 1950. La ville est un immense chantier qui tente d'effacer les béances laissées par la dernière guerre. Les revendications des ouvriers du bâtiment, celles des ouvriers de l'arsenal. La grève générale. Le drame du 17 avril: la police tire sur les manifestants. Vingt blessés et un mort, Edouard Mazé. Le lendemain, René Vautier arrive sur les lieux pour tourner un documentaire. C'est une bonne chose que ce soit justement ce gars-là qui arrive. Cinéaste militant, il est alors recherché activement par la police pour son film anti-colonialiste Afrique 50... Autant dire qu'il n'a pas sa caméra dans sa poche. Sur les plans muets tournés, il improvise une bande sonore: le poème d'Eluard, Un homme est mort. Le jour où la bande sonore lâche lors d'une n'ième projection devant les grévistes, un ouvrier, de mémoire, récite le poème. Ses tripes l'adaptent. L'émotion d'Eluard lorsqu'il entendra "son poème digéré par le peuple".
De ce documentaire, aujourd'hui, il ne reste rien. L'unique copie a rendu l'âme lors de la 150ème projection. Il ne reste rien si ce n'est la bande dessinée de Kris et Etienne Davodeau...
Merci à l'Ours d'avoir déposé ce livre chez moi parce qu'il avait entendu parler d'insurrections singulières sur les îles indigo.

lundi, 25 janvier 2010

TOUT SEUL

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Dans l'océan, il y a un rocher. Sur ce rocher, un phare. Dans ce phare, un homme. La ritournelle s'arrêtera là parce que dans l'homme cinquante ans de solitude s'entrechoquent, à ce qu'on raconte, une vie à tourner en rond sur son caillou, sédentaire malgré lui, rien d'autre. Du monde il ne connaît que le chalutier qui le ravitaille, l'écume et ce que les vagues lui apportent comme objets malmenés. Il ne se montre pas, on le dit monstre. Son nom, même les mouettes l'ont oublié, là-bas, tous l'appellent Tout Seul. Ce qu'il fait de ses journées, personne ne s'est jamais posé la question. C'est pourtant bien, les premières planches tournées, ce qui intrigue. Comment interpréter ces BOUM! qui s'échappent de la tour de pierres? Dans un tête à tête muet avec son poisson -j'allais dire rouge mais aucune certitude à ce sujet lorsque toutes les cases se déclinent entre le blanc et le noir- Tout Seul lance son unique livre, un dictionnaire, sur sa table, l'index pointe alors au hasard un mot, une porte ouverte au-delà de l'horizon.
Etonnant de finir la journée avec cette bande dessinée alors qu'elle avait commencé avec l'avant-première du film émoustouflant de Tony Gatlif sur la déportation des Roms, Libertés. A la genèse de ce film,  le destin d’un dénommé Tolloche. "Interné à Montreuil-Bellay, il réussit à se faire libérer après avoir acheté, par l’intermédiaire d’un notaire, une petite maison à quelques kilomètres de la ville. Incapable de vivre entre quatre murs, il reprit la route pour retourner dans son pays d’origine, la Belgique. Il fut arrêté dans le Nord et disparut en Pologne avec ses compagnons d’infortune”
Taloche et Tout Seul, tout les sépare et pourtant une rage unique à se rouler par terre, se couvrir d'humus et regarder le balancement des arbres pour l'un, à jeter son dictionnaire pour obliger le monde à se dire pour l'autre.

 

mercredi, 31 décembre 2008

CA SE PASSE! (2)

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dimanche, 21 décembre 2008

CA SE PASSE!

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Exauce-nous, Bihel et Makyo, Futuropolis

C'est encore imperceptible. Ces derniers jours, il était même difficile d'y croire: à l'heure du thé à la menthe et des tartines à la purée de noisette la nuit s'invitait déjà, sans complexe, provocatrice et peut-être invincible. Pourtant, encore une fois, malgré la crise et la terre qui risque de tourner irrémédiablement en rond, ça se passe.

C'est encore imperceptible mais c'est bien là, marqué sur le calendrier: aujourd'hui c'est le solstice d'hiver. Aujourd'hui la nuit va commencer à remballer son fatras. Elle essayera encore de s'inviter à l'heure du goûter et on saura lui fermer peu à peu la porte au nez. On ira même la titiller dans ses retranchements, on allumera chaque soir pendant huit jours une nouvelle bougie. Sur le rebord de la fenêtre, elles brilleront tard.

Pour moi, l'année s'achève à ce moment précis du passage de l'obscurité à la lumière enfin retrouvée. Alors, une nouvelle année peut commencer. Elle sera ce que je voudrai bien en faire, au fil des rencontres et de tout ce que je n'aurai pas prévu. Je garderai dans un coin de ma tête Léonard croisé dans Exauce-nous, Léonard à la formule anodine "ça se passe", Léonard l'exauceur de voeux qui change le cours des choses par l'improbable pouvoir des mots. Sait-on jamais... Que ça se passe pour vous!

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jeudi, 21 août 2008

JOURNÉE ORDINAIRE

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Après mes dernières tribulations, j'ai décidé ce matin en posant le pied droit au sol de vivre une journée ordinaire. Ne surtout pas céder à la tentation de lire Rien dire de Bernard Friot. Encore moins se soucier de l'orteil -pas le mien celui sur la couverture du livre que je ne veux pas ouvrir- qui émerge de la chaussette trouée pour me faire de l'oeil.
Aujourd'hui sera une journée tout ce qu'il y a de plus ordinaire. Cela commence par un retour à la nature, courgettes folles et herbes hautes me voici!
Au bout de la rue, à côté de chez moi y a les voisins -jusque-là rien que du très normal- sauf qu'aujourd'hui les voisins ne le seront bientôt plus. Ils déménagent. Le camion est plein pour un dernier voyage, manque seulement la caisse de Miou. Enfin, la caisse est là mais pas le chat. Alors Thomas, le fils anciennement rasta et nouvellement philosophe-anarchiste, cherche Miou, le chat définitivement apolitique, pour le mettre dans la caisse. Je crois bien que le fils comme le chat ne sont pas pressés de quitter la bicoque au bout du chemin juste avant le champ pour un pavillon avec terrasse plein sud. Et  à le voir le fils sans le chat, le cheveu ras et la barbe près de la joue, la caisse à la main, il me fait penser au Marco de Combat ordinaire.

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Et d'un coup, ça me fiche le blues. J'aimais bien quand il passait: on s'asseyait dans la cuisine au dessus d'une bière ou d'une tisane -son clope roulé s'accomode de tout breuvage- parfois on refaisait le monde mais plus souvent on parlait d'écriture.
Mes velléités du jour, il ne leur en faut pas plus pour s'effondrer. Je me dis même que ce n'est pas ce matin que je rendrai les courgettes sages et les herbes rases. J'enfourche mon vélo, direction Poses. Là-bas, sur la Seine, il y a le barrage. Quand on s'aventure dessus, ça bouillonne jusqu'à l'étourdissement sous les pieds. Ca avale les tristesses et les colères avec fracas. Puis on finit toujours par arriver juste après, à l'écluse. Ce qu'on avait cru être la fin du monde s'apaise soudain. Les mouettes y paradent comme savent parader les mouettes, crânement. Les bruits s'économisent. Une péniche attend de passer sous les commentaires d'un grand-père averti. Pour ses petits-enfants, il manie le babord et le tribord avec facilité. Sur son avant-bras gauche, une sirène se prélasse. Celui-là me fait penser au planteur de clous de Combat ordinaire

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Aussi quand on engage la conversation et qu'il raconte les années passées comme batelier, des semaines sans mettre le pied à terre si ce n'est pour décharger, je souris à l'extérieur et à l'intérieur. Et sur le chemin du retour, je me dis même que Ce qui est précieux, ce sont peut-être bien Les quantités négligeables...