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samedi, 15 décembre 2007

JOJO, MULTI-RÉCIDIVISTE!

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Cet après-midi encore, haut perchée sur ses talons, paradant sans fin en des robes impudentes, avec ce quelque chose de fatal et brisé qu'ont les femmes dans les films de Cassavets, elle débouchait sur scène. Cantatrice ratée, lorsqu'elle a chanté "I'm so pretty, so charming" j'ai entendu "so chaplin": c'est dire le burlesque du personnage ou avouer mon niveau d'anglais...

Cet après-midi encore, elle était mère de Jojo, autant dire distributeur automatique de gifles bonnes et carabinées, de claques beignes et torgnoles, dans Jojo, le récidiviste.

Quand, le soir, Delphine Lamand est apparue dans l'amphi, elle aurait pu se fondre parmi mes étudiants: pour nous parler de son travail d'actrice et d'assistante du metteur en scène, elle a juste pris avec elle ses couettes échevelées et ses gestes effrontément enthousiastes.

Jojo le récidiviste, ce fut d'abord la rencontre de deux Jo: Joseph Danan, l'écrivain et Joël Jouanneau, le metteur en scène. Pas le même passé de gifles entre ces deux-là.

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" Moi à la différence de Jojo, j'étais un enfant sage, trop sage peut-être. (Aïe, je sens les parents qui remuent.) Et ma mère, je le jure, ne m'a jamais donné la plus petite gifle (mon père non plus, d'ailleurs). J'ai une hypothèse: c'est que les bêtises je ne les faisais pas, parce que la gifle, je me la donnais moi-même avant de les faire" Joseph Danan

« Enfant, je me demandais si c’était ma joue gauche qui désirait recevoir la paume de la main de ma mère, ou si ce n’était pas plutôt la paume droite de sa main qui était irrésistiblement attirée par ma joue. La réponse se trouvant dans la gifle, je la recherchais au quotidien. Je suis aujourd’hui à peu près convaincu que nous avions trouvé là le sentier interdit de notre « je t’aime » journalier. La lecture de Jojo le récidiviste m'a donc réjoui au point même de penser que Joseph Danan l'avait écrit pour moi. » Joël Jouanneau

Le texte de Danan est la pièce de théâtre la plus surprenante que je connaisse à ce jour: ni dialogues, ni didascalies, juste un enchaînement de séquences où invariablement Jojo se joue avec jubilation des interdits. Presque tout aussi invariablement et sans joute, vient le moment où le morveux tendra sa joue à la gifle-claque-beigne-torgnole maternelle.

Sur scène, au lever du rideau, cela donne un chaos organisé, un tohu-bohu soigneusement rangé, un capharnaüm rigoureusement empilé de part et d'autre de la scène. Soyez les bienvenus dans la chambre de Jojo, joyeuse anarchie, à l'image de la pièce. Au fond de ce décor, une porte, dressée comme limite entre l'imaginaire enfantin et la désillusion frustrée de l'adulte.

Le bric à brac se réveille à l'apparition des maîtres de jeu, Jojo et son copain, il sort de son mutisme. Et en une heure, cette pièce quasi muette rend hommage au trio Chaplin, Keaton, Tati. On y parle comme dans Les vacances de Monsieur Hulot, on se dandine et on y trébuche à la Charlot et on se désarticule et on chute de gag en gag à la Keaton.

Pas étonnant que les gazous au final entonnent le dernier chant polyglotte des Temps modernes.

Au final, on en vient à se demander ce que deviendrait ce Jojo entre les mailles du filet gouvernemental: délinquant bon à recycler?  Et si on y voyait plutôt de la graine de Jouanneau?

 

 

 

18:25 Publié dans THEÂTRE | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : jouanneau, jojo |  Facebook |