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dimanche, 17 janvier 2016

La terre qui penche, Carole Martinez

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La Terre qui penche, ouvert en septembre avec impatience parce que Coeur cousu et Le domaine des murmures.
La Terre qui penche
ouvert en septembre parce qu'il était promesse de rejoindre à nouveau les rives de la Loue.

La Terre qui penche refermé au bout de cinquante pages, le dialogue de la vieille âme et de la petite fille ou plus exactement le monologue de l'une puis de l'autre ne passaient pas.
Je l'ai rendu à la médiathèque le jour même où ma morveuse m'a appelée pour me dire qu'elle venait de l'acheter. Je lui ai tu mes réticences; elle est entrée en "littérature adulte" avec cette auteure, on ne peut pas blesser ces appartenances-là.
Elle m'a rappelée deux jours plus tard. Elle était subjuguée, envoutée, en parlait avec une telle joie dans les mots. Je lui ai avoué avec des quarts de syllabes que j'en avais abandonné la lecture. Elle a soudain pris sa voix de petite poule en colère - cette même voix qu'elle prenait gamine quand on lui demandait d'avancer un peu plus vite sur les sentiers de montagne et qu'elle partait en tête et en colère, en montant dans les aigus.
Un jeudi de décembre, elle m'a rappelée au téléphone et à l'ordre : ce soir Carole Martinez est à l'Armitière. Tu me rejoins sur Rouen et on y va -elle n'avait donc pas lâché l'affaire- tu n'as pas le choix, tout comme tu ne m'as pas laissé le choix de lire ou pas certains romans de littérature jeunesse quand j'étais gamine, sous prétexte que tu les trouvais incontournables. Juste retour des choses. Je lui devais au moins ça. Malgré la journée pleine à craquer de cours, de réunions, de bilans de réunions, je lui ai promis que j'y serais. En fin d'après-midi, je les ai retrouvées, elle et son impatience joyeuse.
Je ne sais pas ce qui m'a le plus touchée dans cette rencontre : l'auteure disant avec tant de douceur le corps des femmes, se demandant ce que chacune, nous avions fait de la petite fille que nous avions été ou les yeux brillants de ma morveuse dont l'enfance n'était pas si loin.
J'ai donc re-réservé le roman à la médiathèque, me promettant de le lire malgré tout jusqu'à la dernière page. Il a mis quelques temps à revenir. Je lui ai offert mon dimanche, m'absentant de mon quotidien avec insolence; au bout de la soixantième page, tout est devenu dérisoire : les cours à préparer, les bulletins à remplir et les bilans de semestre à rédiger. J'ai suivi Blanche et sa force de caractère sur cette Terre qui penche, dans ce siècle où l'humanité a bien failli ne pas se relever, à l'image de cet arbre tombé deux ou trois fois -la vieille âme ne sait plus trop- mais qui est toujours là, il est l'esprit du lieu et l'on ne se débarrasse pas si facilement d'un oracle.
Ce soir, je ne sais plus trop ce qui avait fait obstacle à ma première tentative de lecture mais je lui suis reconnaissante d'avoir été là.  Sans lui, tout le reste ne se serait pas déroulé.