jeudi, 03 avril 2014
HEROS
Mercredi 2 avril
Hier, il y eut le passage d'un portefeuille de Vincent Peillon à Benoît Hamon. On verra bien quels seront l'audace et le courage de ce nouveau ministre...
Hier, il y eut surtout le passage d'Oedipe Roi de Sophocle à Wadji Mouawad.
Avant tout, je dois avouer ici que je suis une spectatrice de tragédies grecques intolérante. Je suis prête à aboyer à la plus petite apparition de médiocrité sur scène. Je ne pardonne rien et n'attends que l'excellence et le brio. On ne touche pas impunément à des textes d'une telle grandeur pour se contenter d'une pâle copie de ce qui devait se faire à Athènes, il y a vingt-six siècles.
Ainsi, il y a plus de vingt ans j'ai quitté au bout d'un quart d'heure un Oedipe Roi grotesque et insipide joué à la Comédie Française -que j'ai regretté de ne pas savoir siffler, le pouce et l'index outrés, posés sur les lèvres!- et suis retournée soir après soir, puis des samedis entiers voir Les Atrides de Mnouchkine à la Cartoucherie.
Hier, dès les premières minutes, j'ai eu cette certitude que Sophocle aurait applaudi devant une telle réappropriation de la violence et de la beauté de son texte.
« Sophocle, c'est un vertige. Un souffle puissant. Une matrice de la littérature occidentale. Je souhaitais le monter dans son entièreté, car j'aime les aventures fleuves qui charrient avec elles marécages et beauté, paysages, eaux pures et eaux sales, férocité, émotions et catharsis. »
Et la fulgurance de la mise en scène: Oedipe qui nous regarde de bout en bout sans jamais s'abaisser, dans sa démesure, à un face à face avec les autres personnages, Jocaste promise à un suicide certain qui entre en scène la corde au cou, le choeur antique réduit à deux chanteurs et cet immense panneau noir en fond de scène qui peu à peu descend puis se décompose au fur et à mesure que la vérité éclate.
Ce billet semble fait de bric et de broc et le mot passage aurait presque l'air d'un lien surfait. Une deuxième citation de Wadji Mouawad réussira-t-elle à lier le tout?
"Tous les héros ne cessent de claironner leur vertu et sont pourtant rattrapés, à la fin (...) Le héros tragique agit avec démesure en pensant qu'il est un dieu.
Il s'agit de “connaître” sa mesure : si tu penses que tu es un dieu, c'est démesuré. Si tu crois que tu n'es rien, c'est sous-évalué. Entre le rien et le dieu, où es-tu, toi ?"
14:48 Publié dans THEÂTRE | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : les atrides, oedipe roi, wadji mouawad, ariane mnouchkine | Facebook |