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mercredi, 30 juillet 2008

RESTES

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Vous est-il déjà arrivé de parcourir de l'index la tranche des livres de votre bibliothèque, tout en vous demandant ce que chacun d'entre eux avait imprimé en vous? A l'issue  de cet exercice, je me suis retrouvée au beau milieu de fragments -de situations, de personnages, de bouts de phrases ou sensations- et parfois au milieu de ces décombres, un récit est réapparu. Pour certains est juste resté indélébile le moment de sa lecture.

Vous est-il déjà arrivé au détour d'un coin de rue ou d'un visage de songer à un roman? Hier, j'ai emprunté un sentier bordé de roses trémières. Inévitablement, j'ai aussitôt pensé Au bonheur des ogres de Pennac: Môôssieur Mlaussène et sa maison de campagne envahie par les dites fleurs. Mes souvenirs de lecture sont incertains, la maison appartient-elle à Malaussène ou à sa copine? Par contre je suis sure qu'il s'agit bien de roses trémières. A l'époque, je ne savais pas à quoi cela ressemblait. Mon imagination leur avait confié un aspect farouche, quelque allure de fleurs tropicales carnivores. Il faut préciser que leur présence rendait impossible l'entrée dans le jardin après quelques mois d'absence. Des petits riens pour de longues heures de lecture: ma mémoire sélectionne et classe en suivant les règles d'un jeu qui m'est inconnu.

Inversement pour certains romans, à peine la lecture achevée, je l'aide à faire son ouvrage. De Alors partir? de Julia Billet, je veux juste graver en moi ce que l'ancien de la tribu de gitans rappellent aux siens lorsqu'ils apprennent qu'ils sont expulsés par la commune et qu'ils vont devoir reprendre la route après six années sédentaires. Peut-être parce que le terrain pour gens du voyage qui se construit, pas loin de chez moi, pour la bonne conscience d'une commune, a des grillages trop hauts. Peut-être parce que ce qui se passe en Italie à des relents de déjà vu. Peut-être parce que certains jours je me sens étrangère au monde que j'habite...

"Ils croient posséder et ils n'ont rien.  Ils détruisent la Terre, oublient leurs enfants, oublient qu'un jour tout sera pourri par la fumée, les engrais, les gaz, les voitures, leurs centrales nucléaires, leurs déchets qu''ils cachent. Ils brisent, cassent, brûlent, sans savoir qu'ils scient la branche sur laquelle nous sommes tous assis.
Nous n'avons rien, rien d'autre que notre foi, notre savoir, nos corps et nos esprits. Nos vies ensemble sont liées à jamais, depuis toujours. La Terre a donné à chacun de nos pas des pans de la sagesse qui manquent aux gadjé. Ils ne bougent pas, restent attachés à des bouts de Terre, jusqu'à croire que la propriété est un acte. Ils sont fous de leurs biens.
Nous avons collecté ces morceaux de l'humanité et nous devons les transporter toujours plus loin pour continuer à faire tourner la Terre. Ils ne savent pas que la Terre tourne parce que la marche de notre peuple la fait tourner. Nous, Gitans, Roms, Tsiganes, nous et aussi les nomades des déserts, les nomades de toute race, de toute la Terre, nous donnons son mouvement circulaire au globe par la force de nos pas..
Nos pas font rouler la Terre sur elle-même, nos pas font marcher leur monde à eux aussi.
Et ça non plus, ils ne le savent pas. Ils nous pensent inutiles, voleur et fragiles; nous sommes forts et nécessaires à leur survie.
Peut-être nous sommes-nous arrêtés depuis trop longtemps maintenant? Peut-être est-ce pour cela que la Terre ne tourne plus rond?"
Alors partir, Julia Billet, Seuil

 

 

 

samedi, 26 juillet 2008

DE L'USAGE DE "DE"

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De est ce qu'on appelle une préposition. Mais si, voyons, vous aviez une petite phrase pour vous en souvenir à l'école. Vous dites? Non, ce n'est pas "mais ou et donc or ni car". Auriez-vous oublié le pauvre Adam qui fait sa valise pour Anvers? L'histoire ne racontait pas s'il y allait à pinces ou à vélo, ce qui est sûr c'est qu'il n'était pas assez fortuné pour y aller en train: à dans par pour en vers avec de sans sous.
Revenons donc à la huitième préposition de la liste. A quoi sert-elle lorsqu'elle ne permet pas à notre ancêtre d'aller boire un petite mousse chez nos voisins?
Elle peut marquer l'origine.
ex.1: Pablo vient de Colombie. Là-bas, la peau sentait le soleil et non pas le beignet inachevé.  Là-bas, on pouvait marcher dans des rues qui embaument l'ananas et la mangue. Là-bas, il a fallu marcher une nuit, dans le silence pour ne pas réveiller les bottes jaunes et s'exiler, sans papiers, la famille au grand complet, d'abuelita à la petite Rose, jusqu'à un HLM de la Courneuve.
Elle peut marquer aussi la cause.
ex.2: Pablo est blanc de peur à l'idée de devoir récupérer une poupée chez la Goule, sorcière aux ongles bien sûr longs. Sauf qu'une fois cet exploit accompli, de la cause on passe à l'appartenance.
ex.3: La Goule devient la confidente de Pablo. Confident aussi, Georges, percuté à un carrefour, cycliste adjoint au maire et sans doute membre de RESF -mille respects, monsieur, que ne convertissez-vous tous vos collègues. Et Marisol qui échangerait bien un sol contre un e, Marie, confidente et hermania prête d'un coup de crayon pour les yeux à raturer ses origines. C'est compter sans son frère. Et puis, il y a...
ex.4: Pablo de la Courneuve
Pablo, dès qu'il dispose de quelques minutes, marche loin des tours. Il marche comme il marchait dans son pays. Il n'est pas originaire de la Courneuve ni ne lui appartient. Pourtant dans ce "de" là se déploie tout le chemin parcouru qui fera qu'un jour il lui sera possible de dire qu'il est Courcolombien. Ce "de" là vaut largement une particule. Pablo DE la Courneuve.

 

 

 

samedi, 19 juillet 2008

FUITER

L'on connaissait le verbe fuir, pour l'avoir trop souvent conjugué à la troisième personne à l'école lorsqu'un robinet perdait tant de gouttes par heure, gouttes qu'il fallait ensuite transcrire en termes de litres par jour. Inévitablement s'en suivaient des oh la la d'étonnement: que de bains qui s'étaient égouttés incognito! Plus personnellement, depuis hier, je connais le verbe fuir à gros flots dans la salle de bain en travaux, devenue pour l'occasion une pataugeoire, pis-aller des bains perdus.
Or, dans la colonne de fuir vient d'apparaître dans l'édition du Larousse 09 (1) un doublon en la personne du verbe fuiter. A l'heure où j'écris ce billet, aucune fuite quant à la définition de ce verbe...
Ces derniers jours, lorsque mes activités de peintre-carreleuse se déroulent sans trop d'encombres -autant dire lorsque le mur à peindre ne se révèle pas pourri au point de le changer ou lorsque les carreaux se décident enfin à tenir sur un mur qui gondole- je lis. Fini en début de semaine un roman de Claudie Gallay que la franco-québécoise m'a apporté en attendant de récupérer Les déferlantes à la médiathèque.

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Office des vivants: le parallèlle s'imposait avec l'office des morts. Influencée par la couverture, j'avais même imaginé que le récit tourbillonnerait dans un camp d'extermination. Personnages en survie, certes, mais dans Les Cimes, là haut, là où au pied de l'arbre on enterre le cordon, celui qui reliait à la mère. Marc et Simone ont le leur mais pas Manue, née de l'éblouissement du père pour Mado. Manue venue avec la pluie et l'éblouissement de Marc qui parle aux arbres, pour les loups, pour Manue.
Lu ensuite, juste derrière sans reprendre mon souffle, quand elle sera reine de Rachel Hausfater.

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La fatigue aidant et les problèmes de fuite de robinet, je ne sais plus lequel des deux j'ai dans les mains. Les personnages fuitent. Mira et Manue, toutes deux de mère inconnue, filles flamboyantes en marge d'une société pensant à mal de préférence. Et Mira qui tourbillonnera, elle, dans un camp.

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Croyant souffler, j'écoute la Fille, à la dernière page de Le souffle des marquises de Muriel Bloch et Marie-Pierre Farkas, exclamer (2) à qui veut bien l'entendre son mécontentement. De la saga, seul est disponible le tome 1. En suspens, Eléonore que tout destinait à frotter les cuivres dans la cuisine et qui, malgré l'interdiction paternelle, jouera du cornet à piston. Elle, son tourbillon, c'est la Commune, l'exposition universelle, les frères Sax et Jim Mississippi venu de Nouvelle-Orléans.

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Croyant me reposer, le soir venu, je propose au Fils de me rejoindre sur le banc, dehors, pour poursuivre la lecture de Coeur de Louve à la lueur de l'éclairage public -ceci est possible jusqu'à 23h après l'éteigneur de réverbère passe. Les personnages fuitent à nouveau. Demain, je dirai à la Fille qu'en attendant septembre pour le tome 2, il y a Mauve et la Commune et la fuite pour Québec.

Fuiter, vb intr.: se dit de tout personnage de littérature jeunesse s'amusant à passer d'un roman à l'autre.

(1) ndrl: l'indigotière ne jure que par son vieux Bob, dit aussi Petit Robert et fait en général peu de cas du Larousse.
(2) Ce verbe-là existe-t-il autrement qu'à la forme pronominale? Je viens peut-être de trouver un néologisme pour le Larousse 10...

lundi, 07 juillet 2008

IMAGIER

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IMAGIER: faiseur d'images (Littré)

A l'Hôtel de Mora, centre de l'illustration à Moulins, se tient jusqu'au 12 octobre une exposition consacrée à Solotareff. Ce faiseur d'images a amené son imagier. Toutes ses images sont là, dépunaisées lors d'un dernier déménagement: celles de ses personnages mais aussi des photos, des tableaux. Dissonante galerie. Au lieu de les rendre au silence d'un carton, il a voulu les montrer, ailleurs, les exposer.
Il orchestre le tout en une réflexion essentielle sur son travail.

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"Les montrer, les publier toutes, les unes à côté des autres, en vrac, faire une exposition, un livre, interminables, autrement dit sans doute ne pas mourir.
Non, ne pas les montrer toutes, impossible. Et pas en vrac. Il y a  des images qui ne vont pas ensemble, qui se détruisent, qui n'existent pas à côté d'autres plus percutantes, parce que trop délicates. Les deux sont pourtant des qualités.
Car il y a deux sortes d'images. Celles que l'on fait à toute vitesse, en urgence, pour arrêter le temps et saisir l'idée qui naît à peine. Et puis celles au contraire qui mettent du temps à se faire qui se caressent, qui se grattouillent, qui sont davantage le fruit d'une réflexion mûrie et apaisée.
Le temps, l'humeur, l'énergie se lisent sur un dessin autant qu'en muisque. Il y a des dessins puissants, brutaux, bruyants, d'autres gracieux, sensibles hésitants, silencieux. Si l'écriture est danse, le dessin est musique."

In Solotareff imagier, éditions MeMo, 2008
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jeudi, 03 juillet 2008

TIRE L'IRE

 

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En rire
Des sires et des sbires
Des spires et des saphirs
Des kirs et des fakirs

Et Le Roi Lear

En rires
Les hetaïres et les tire-lire
Tyr et l’Epire
Les menhirs et les zéphirs

Et Shakespeare

En rires écrire des ires