Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 20 octobre 2015

Sabotage

4792455_3_92b6_erri-de-luca-lors-de-son-proces-pour_d81736df685d756face8d53ad48ea55c.jpg
Erri de Luca ©Marco Bertorello, AFP

Lundi 19 octobre, Erri de Luca a été relaxé par la justice italienne. Le Parquet avait requis huit mois ferme contre lui pour "incitation au sabotage" du percement d’un tunnel de 57 kilomètres pour le futur TGV Lyon-Turin.
Avant que la cour ne se retire pour délibérer, l'écrivain a répété qu'il considérait le verbe saboter comme noble et démocratique, qu'il défendait l’origine du mot dans son sens le plus efficace et le plus vaste : "Je suis prêt à subir une condamnation pénale pour son emploi, mais non pas à laisser censurer ou réduire ma langue italienne. »
En lisant cela hier soir dans Le Monde, j'ai entendu pour la première fois le mot "sabotage". Je veux dire par là que son étymologie m'a soudain sauté aux yeux. Sabotage vient de sabot ! Quel chemin de traverse le mot avait-il emprunté pour passer d'un sens premier "fabrication des sabots" à celui d'action de saboter un travail ? Suis allée fouiller dans mes dicos : ils passent tous d'une définition à l'autre, allègrement, sans explication aucune. La langue aplanie, domestiquée. Exit sa fougue qui, un jour, a imposé au mot un nouveau tournant. Désagréable impression de me retrouver les deux pieds dans le même sabot. C'est ainsi chaussée que je suis allée voir Mustang de Deniz Gamze Ergüven. Magnifique histoire de sabotage là aussi : celui d'une société patriarcale qui voudrait imposer sa loi à cinq fougueuses soeurs.
Ce matin, dès le réveil, pieds nus sur la tomette froide, j'ai repris ma recherche et ai déniché un extrait du passage d'Erri de Luca à La Grande Librairie, le 9 avril 2015, pour son livre Parole contraire.  Il rend au mot "sabotage" ses lettres nobles et démocratiques : au début de l'époque industrielle, les ouvriers employés dans des usines textiles avaient jeté dans les machines leurs sabots par solidarité avec leurs collègues expulsés par la mécanisation.
Je vous laisse en sa compagnie. Moi, je m'en vais dans ma journée, chaussée de deux sabots, autant dire de deux sabotages potentiels...


 

 

 

 

Commentaires

Chouette tu es en vacances, les Iles Indigo vivent...

Écrit par : moucheron | mardi, 20 octobre 2015

ah, merci pour cette heureuse leçon, les mots et leurs histoires sont étonnants des fois :-)

Écrit par : Gilsoub | mardi, 20 octobre 2015

Merci beaucoup... Erri de Luca nous accompagne aussi...

Écrit par : Topa | mercredi, 21 octobre 2015

J'aime beaucoup l'écrivain et plus encore l'homme. Exemplaire et humble.

Écrit par : Zoë Lucider | jeudi, 22 octobre 2015

Les commentaires sont fermés.