Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 21 mars 2017

Biffure 13

fenêtres sur cour.jpg

Janela indiscreta
Lisbonne, février 2017

encore.
le soir
comme fou
valser au pied
d'une nuit
qui se rétracte
un geste de ta peau
endort
la fatigue

*Mots rescapés des biffures de la page 116 de Les Fragiles de Cécile Roumiguière.

samedi, 22 août 2015

Lily, Cécile Roumiguière

chat roumiguière.jpg

Athènes, mai 2015

J'ai ouvert l'été par la lecture d'En vieillissant les hommes pleurent de Jean-Luc Seigle. Je viens de refermer ce matin Lily de Cécile Roumiguière. Tous deux se passent dans les années soixante pendant les évènements la Guerre d'Algérie quand l'Histoire lève sa grande hache au-dessus d'hommes apeurés. Certains se dressent, d'un côté ou de l'autre de la lame affutée.

cécile roumiguière, sur un toit un chat, Lily

Juin 2013, un grand-père et sa petite-fille sortent de la cinémathèque. Ils viennent d'aller voir Les parapluies de Cherbourg de Demy. L'une a trouvé le film guimauve - Non je ne-pou-rrai jamais vivre sans toi - l'autre l'a reçu en plein coeur. C'est la porte ouverte à tous ses souvenirs, réels ou imaginés. Il raconte les seize ans de sa cousine Lily dans Paris, en 1961. Lily qui a tatoué sur sa peau son amour trop fort pour son frère parti en Algérie dont elle est sans nouvelles. En un geste indélébile pour remplir l'absence. Lily qui malmène son corps pour rentrer dans les ballets de l'Opéra parce qu'un jour son frère, juste après la mort du père, lui a dit qu'il la rêvait ainsi. Lily qui rêve, sur un air de Tonight, d'un autre pas de danse dans des ballets où tous les corps ne seraient pas identiques. Lily qui est parvenue à cette heure où elle va inventer sa propre vie. Elle me fait penser à  Bala et cette phrase d'Une Princesse au palais "cette heure qui t'éloigne de l'enfance, jamais tu ne l'oublieras." lui irait si bien. 
Et dans les marges du récit, au-dessus des décors de la scène de l'Opéra, en italique dans le texte, il y  a Nino, tout à la fois ange gardien et poète; il habite le roman comme un chat sur un toit.

dimanche, 22 septembre 2013

Le fil de soie, Cécile Roumiguière et Delphine Jacquot

le fil de soie.jpg

Cette fois-ci, M'dame Cécile, mon facteur vous remercie. Faut dire que depuis quelques années il appréhende les jours où il doit confier à ma boîte aux lettres l'un de vos albums. Il y avait eu Rouge Bala qu'il avait dû se résoudre à écorner. Puis ça avait été le tour d'Une princesse au palais, tellement grand qu'il avait pris le risque de le laisser trôner au-dessus de la boîte, au milieu du chèvrefeuille. Alors, de pouvoir glisser aussi facilement Le fil de soie l'a rendu heureux.
Moi, de le découvrir jeudi soir, au milieu des factures et autres courriers inutiles m'a rendue soudain joyeuse. Je ne l'ai pas ouvert tout de suite. J'ai attendu de retrouver espace et temps libres.

Hier soir, je l'ai lu. Je suis allée des illustrations au texte. Magnifique*. Du texte aux illustrations. Splendides*.
Celles de la page de droite, qui déroule un tête à tête, au-dessus de la table de couture, entre Marie-Lou -une gamine malmenée par l'école- et sa grand-mère Mamilona. Mamilona ne lit pas, elle coud et chante; toujours la même chanson; Ederlezi. Quand sa petite fille lui demande de traduire les paroles, elle se défile avec l'élégance du silence.
Et celles de la page de gauche, qui en pointillés laissent les souvenirs de Mamilona défiler.
Mamilona ne lit pas mais elle sait écrire au fil de soie la trame de ses souvenirs sur une robe de poupée pour sa petite fille: l'enfance manouche, les camps d'extermination et la vie qui reprend malgré tout.

Aujourd'hui, je l'ai parcouru à nouveau. Puis je suis venue écrire ici, tout en écoutant en boucle Ederlezi. L'interprétation de Bratsch et celle de Goran Bregovic. J'ai cherché des mots qui n'écorneraient pas trop l'album. J'ai aussi repensé à T. et à ce qui s'était passé l'année dernière. Maintenant sur l'épaule d'Angel, il y a un fil de soie...

*Ces adjectifs ne voulant rien dire, allez donc voir sur le site des Editions Thierry Magnier, les premières pages de l'album.

vendredi, 01 février 2013

Aujourd'hui coup.

6935572_orig.jpg
Photo de Bernard

308/366
Mercredi matin, mes Biobios rencontraient Jean-Michel Payet pour son roman 2065. Etant donné notre projet annuel autour du Développement Durable, ce bouquin, c'était un vrai cadeau: Emile, en une journée, se voit traiter de gros naze par sa copine et de bon à rien par ses parents. Il ne lui reste plus qu'une solution, aller voir dans le futur s'il sera ou non un mec bien. Justement son grand-père a un trou dans la cave qui remplit l'office de machine à voyager dans le temps... Lorsqu'il débarque plus d'un demi-siècle plus tard, les pires prévisions cataclysmiques se sont réalisées.
Mes Biobios ont dévoré ce roman, certains ont avalé les tomes 2 et 3. Je leur ai parlé aussi de Blue cerise, une écriture à huit mains du même auteur avec Sigrid Baffert, Cécile Roumiguière et Maryvonne Rippert : quatre auteurs, quatre personnages -Zic, Satya, Amos et Violette- quatre points de vue. J'avais pris ce jour-là dans ma bibliothèque la saison 1, L'ange des toits, espérant bien qu'il repartirait dans un sac à dos. J. s'en est emparée et elle avait le sourire d'une gamine heureuse du tête à tête qui se préparait entre elle et le roman.
Ce même mercredi, J. arrive, le sourire est toujours là mais quelque chose d'embarrassé s'y est rajouté. Elle me dit qu'elle n'a pas achevé la lecture de L'ange des toits parce qu'il y a "des trucs bizarres". Elle feuillette rapidement le premier récit, celui de Violette et me montre un paragraphe que ma mémoire avait complètement effacé: Violette refusant de se prêter avec son copain à une pratique sexuelle qu'elle ne peut assumer. En relisant ce passage, le regard de la gamine fixé sur moi, j'ai soudain regretté d'avoir joué le rôle de passeur avec ce roman: J., ses à peine douze ans et sa candeur n'étaient pas prêts à lire ces phrases. Je le lui ai dit, avec des mots maladroits, les premiers qui se sont pointés à mon esprit. Le soir venu, j'ai envoyé un mail à ses parents, non pas pour me protéger d'une plainte mais pour m'assurer qu'ils en discuteraient avec elle. Ce matin, la réponse de la mère dans ma boîte: "Ne vous inquiétez pas, J. m'en a parlé spontanément  et on prendra le temps de faire le point avec elle, nous sommes conscients que les livres peuvent cacher des trésors mais aussi des passages plus sombres. C'est  l'occasion de discuter avec J. et d'aborder des sujets qui  ne l'auraient peut être pas été." Du coup, le poids qui pesait sur ma poitrine depuis deux jours s'est volatilisé.

mercredi, 21 novembre 2012

Aujourd'hui une chance.

366.jpg

235/366
Aujourd'hui c'est une chance que la contrainte ne soit pas entortillée comme celle d'hier. Elle me laisse la liberté d'écrire dans la marge et d'y déposer une colère.
Que s'est-il passé dans la tête de certains de mes élèves vendredi soir? Dans la matinée, T., un petit gars du voyage scolarisé chez nous leur avait dit, comme on partage un bonheur, que ses cousins allaient venir le chercher à la fin des cours. Toute la journée, la rumeur a pris forme, s'est nourrie d'elle-même, s'est mise à enfler, à gonfler, s'est réjouie de prendre de telles proportions. A 17h, elle avait la grande satisfaction de dire cela, la rumeur: les gitans, armés jusqu'aux dents allaient venir les égorger. Certains sont sortis avec leur compas dans leur poche, d'autres leurs ciseaux, prêts à en découdre.
Lundi matin, nous avons effectivement décousu tout cela: la peur de l'autre qui peut faire battre le coeur avec une certaine jubilation, les préjugés. J'ai demandé si leur mémoire avait fait des confettis de l'album lu en début d'année, Ogre, cacatoès et chocolat de Cécile Roumiguière et Barroux. Pourtant, ils m'ont raconté l'ogre tapi dans son ennui et dans la forêt. Il a une sale réputation, l'ogre. Dans la bouche des mères, c'est le monstre avec toute sa cohorte de on dit. D'ailleurs, sur la page, il est énorme, noir et difforme. Ils se sont souvenus de Manon, la collectionneuse de bouts de papiers et de mots improbables. De leur rencontre. De la parole qui a ce pouvoir de percer la baudruche des peurs collectives d'un coup d'aiguille. De Barnabé -c'est l'ogre épouvantable de la première page mais maintenant il a un nom- qui sur la dernière page a une taille humaine.

51dzsOxZKQL._SL500_AA300_.jpg


Je crois désespérément au pouvoir des mots. Rien ne m'est plus insupportable que ces situations qui s'enlisent parce que la parole n'est plus possible. Dans mon sac, ce matin, je rajouterai une pile de Dans les yeux d'Angel de Cécile Roumiguière. Je le prêterai à qui voudra le lire. Angel ou T. Que ce roman puisse les faire avancer.

Dans-les-yeux-dAngel5.jpg

lundi, 03 septembre 2012

Aujourd'hui dans mes poches.

366 réels à prise rapide,carole chaix,cécile roumiguière,une princesse au palais

156/366
Je ne vous mentirai pas plus longtemps. Le dernier album de Cécile Roumiguière et Carole Chaix n'a aucune chance de rentrer dans une de mes poches, aussi grande soit-elle. Le facteur, cette fois-ci, n'a même pas essayé de le faire entrer dans ma boîte. Je l'ai découvert au-dessus, trônant au milieu du chèvrefeuille.

Parler d'Une princesse au Palais est un exercice intranquille. Quels mots permettront d'approcher ce tourbillon? Cela fait quelques jours que j'essaie de trouver l'évidence entre lui et une des contraintes du jour des 366. Vous serez donc prévenus, c'est timidement que je vais tenter de l'aborder...
Emballage: oh que oui, j'ai été emballée par ce bistrot fourmillant de passages où Elle vient passer tous ses mercredis, entre attente de sa grand-mère et ennui. Au milieu des habitués, des étagères du lieu et de leurs objets. On ne sait plus où s'arrête le réel et où commence l'imaginaire. Suivre le premier plan et celui juste derrière, au milieu d'un brouhaha incessant.
Animal: Poke, le lapin doudou et Peek, le lapin statue à la montre gousset : ces deux-là ne courent pas après un improbable retard comme le lapin blanc de Lewis Carroll; ils commentent la journée de Elle, ils sentent bien que ce mercredi n'est pas tout à fait comme les autres.
Le territoire de: ce mercredi, s'ouvre pour Elle un nouveau territoire qu'elle ne sait pas délimiter sur son ardoise. Les rayures de son pull parlent pour Elle, entrenouées, à fleur de ventre. Si Elle avait posé la question à la dame aux gants, elle aurait pu lui dire : "cette heure qui t'éloigne de l'enfance, jamais tu ne l'oublieras."
Peu importe, au final, que cet album soit trop grand pour entrer dans une poche. A la rentrée, je le prendrai sous le bras et trouverai le temps de le lire à mes élèves.

841da834e3.jpg

 

mardi, 26 octobre 2010

ROUGE BALA

201010121098_w350.jpg
Cécile Roumiguière et Justine Brax
Edition Milan

A Hannah...

Je l'ai trouvé dans ma boîte, ce soir en rentrant. Il avait dû s'écorner un peu pour y trouver place. Rouge Bala, je l'ai ouvert tout de suite remettant à plus tard les parties d'échec avec le frangin -de toute façon c'est plus souvent échec que mat pour moi. Je l'ai ouvert, touchée par la dédicace de Cécile Roumiguière. Depuis que j'ai parlé sur mes îles de Pablo de la Courneuve, elle continue de tisser le lien.
Bala à la frontière de l'enfance, Bala qui ne veut pas être marquée trop vite du bindi rouge de la femme mariée, Bala qui demande à choisir sa voie, rouge Bala.
Cécile Roumiguière fait partie de ces auteurs placés à la frontière, de celle que les ados franchissent le coeur à vif et le regard fier, voudraient être vite de l'autre côté et pourtant un bout de semelle renâcle au creux de leurs certitudes. A côté d'elle, je place Maryvonne Rippert. Pas étonnant que ces deux-là se soient retrouvées dans l'écriture à huit mains de Blue cerises. C'est ce que je me disais ce matin, coupée de tous, sous  la couette, en lisant la saison 1 in extenso ou presque puisqu'Amos est introuvable ...
Heureuse que l'auteur de Métal mélodie ait rencontré une poignée de mes collégiens le week-end dernier au salon du livre de littérature jeunesse d'Evreux. C'est une chose d'être passeuse de frontières mais quand en plus les mots sonnent juste où il faut, ils franchissent la ligne moins écornés.