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dimanche, 26 avril 2009

DÉCADE

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Les hasards de l'étymologie provoquent des rencontres inattendues. Ainsi, décade se retrouve à cohabiter avec décadence. Dix ans -d'aucuns, minimalistes sans nul doute, veulent n'y voir que dix jours- sont ainsi suivis de près par un débagoulis d' affaissement, déclin, dépérissement et chute dans mon vieux Bob.
A la veille d'entamer ma cinquième décade, j'aime les plis qui se sont inscrits à la pointe du regard, replis des jours passés. La vie a marqué ça et là, c'est autant de souvenirs empilés.
Pour clôre cette journée, il me plaît de relire ces mots de Béatrice Fontanel qui provoque des rencontres plus heureuses que celles de mon vieux Bob.


Comme j’aimerai toujours
« le frais cresson bleu »
« le frais cresson bleu »
« le frais cresson bleu »
Cresson grésille sur les papilles
comme l’eau dans la poêle brûlante.

Le plancton qui s’infiltre
entre les fanons de la baleine
lui donne-t-il la même sensation ?

in Tentacules et manivelles
(recueil orphelin d'éditeur à ce jour)

vendredi, 24 avril 2009

LE STAPEUR

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Quant au garde-nid* placé dans le stapeur** hier soir, est-ce sa seule présence qui a convaincu les volatiles, stériles jusqu'alors, à pondre trois oeufs ou le message*** sans appel laissé sur sa coquille par Ours Gris?

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Et l'hirondelle qui a décidé depuis deux jours de faire son nid dans l'entrée de la dépendance promet-elle le printemps?
Tout cela annonce bien qui vaille.

 

*: fac-similé d'oeuf mais aussi mode d'emploi injonctif du stapeur
**: néologisme du verbe "se taper". Selon Ours Gris, expert es nombreux domaines, les poules ont besoin d'un lieu étroit et couvert où se taper avant de faire don d'une masse ovoïdale.
***: les poules auraient-elles eu peur que leur appartenance à l'ordre des gallinacés soit ici remise en cause?

lundi, 20 avril 2009

VENT PRINTANIER

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Photo d'Anita

Ca y est les vacances de printemps sont arrivées et pour moi une grande respiration...
J'ai mis un peu d'ordre dans le jardin: les herbes adventices, communément appelées "mauvaises", ne sont toujours pas enclines cette année à quelque bonté. Je ne procède jamais à leur extermination sans avoir une pensée pour Ruines de Rome de Pierre Senges. Peut-être un jour oserai-je leur laisser le champ libre...
J'ai lavé le hamac qui, tout une saison durant, dans l'entrée de la dépendance, a ouvert sa trame aux visites catarrhales de l'hiver. Une odeur tenace qui ne pouvait s'accomoder aux premières effluves de la glycine voisine.
Il ne me restait plus qu'à trouver un livre en accord avec cette volupté, les babouches abandonnées dans l'herbe. J'ai commencé par quelques titres retenus pour le prix France Inter. Paris-Brest de Viel, Traques de Clémençon. Inspirez, expirez, ci-gît l'inavouable des familles. Du coup, j'ai enchaîné avec un roman à la couverture faux-semblant-bouton-d'or, en prétendue harmonie avec le gazon fraîchement tondu. Quand je l'ai ouvert, le seul souvenir de nature qui s'est imposé à moi a été le frais cresson bleu et des haillons d'argent dans un trou de verdure. L'homme barbelé, Béatrice Fontanel en avait parlé en octobre. J'avais hâte de voir comment son ton iconoclaste pourrait ouvrir le placard de famille et dire Ferdinand, le grand-père, héros des deux guerres et tyran domestique. A chaque tournant de page, je m'attendais à lire la boussole de mon grand-père, pièce authentique du musée familial qui lui avait permis de s'échapper des travaux forcés en Allemagne. Ceci dit, elle y parle aussi du printemps, à sa manière...
"L'almanach s'est ouvert au hasard, en mars. Le mois de l'arrestation de Ferdinand. On peut y lire les travaux du mois: Au jardin: bêcher et semer: pois, carottes, radis, fèves. (...)Au verger: tailler les arbres. Commencer le greffage, supprimer les chancres, cicatriser les blessures...
Les détenus des camp avaient souvent des furoncles qui s'infectaient, furoncles qu'ils ne savaient pas comment protéger et qui suintaient.
A la rubrique "Vie naturelle" de l'almanach est annoncé le retour de la grive et du pigeon ramier. (...) Cueillette des plantes médicinales: bourgeons des sapins, fleurs de tussilage, primevères...
Les bourgeons m'ont toujours mise mal à l'aise. Je n'ai jamais compris pourquoi tant de gens s'attendrissaient devant eux. Lorsque j'avais quatorze ans, une prof de français nous avait demandé d'écrire un poème sur le printemps. A l'époque, je connaissais peu de choses sur la Shoah. J'avais écrit en rimes bancales que le printemps puait, que les bourgeons velus et collants n'étaient que putréfaction annoncées, furoncles de saison. (...)
La semaine dernière, en travaillant à la rédaction d'un livre pour enfant sur l'histoire de France, j'ai appris que les grandes rafles entreprises un peu partout en Europe en 1942 avaient été baptisées par les nazis du nom de "Vent printanier"."
Demain, il faudra que je me trouve des lectures en adéquation avec la saison. Je pensais à la mignonne de Ronsard, mais il me semble que c'est encore une histoire qui finit mal...

Ce mardi 21 avril, le vent a soufflé sur Calais...

samedi, 04 avril 2009

PARADOXE (2)

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La parole donnée
D'une date de péremption
Est estampillée

15:53 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : haïkus |  Facebook |

vendredi, 03 avril 2009

EMPAROUILLAGE

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Ce poème a écorcobalissé ma route cette semaine ripe à ra et rape à ri. Sans me défaisser, je le libuque sur les terres  de mes îles...

LE GRAND COMBAT

Il l'emparouille te l'endosque contre terre ;
Il le rague et le roupète jusqu'à son drâle ;
Il le pratèle et le libuque et lui baruffle les ouillais ;
Il le tocarde et le marmine,
Le manage rape à ri et ripe à ra.
Enfin il l'écorcobalisse.
L'autre hésite, s'espudrine, se défaisse, se torse et se ruine.
C'en sera bientôt fini de lui ;
Il se reprise et s'emmargine... mais en vain
Le cerceau tombe qui a tant roulé.
Abrah ! Abrah ! Abrah !
Le pied a failli !
Le bras a cassé !
Le sang a coulé !
Fouille, fouille, fouille
Dans la marmite de son ventre est un grand secret
Mégères alentour qui pleurez dans vos mouchoirs ;
On s'étonne, on s'étonne, on s'étonne
Et vous regarde,
On cherche aussi, nous autres, le Grand Secret.


Henri MICHAUX ; Qui je fus Gallimard, 1927


08:44 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michaux |  Facebook |