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mardi, 06 septembre 2016

Aux jours qui viennent

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Pavement du Duomo
Siena, août, 2016

"Nul ne sait le passé qui nous attend", Orlando Luis Pardo, in Cuba, année zéro

Dans le Duomo de Sienne, je n'ai pas résisté au plaisir de mettre mes pieds face à ceux de la Sibylle de Cumes, prêtresse d'Apollon, experte en prophéties. Entre nous deux, plusieurs siècles et cette légende : "Sibylla Cumana cuius meminit Virgilius Eclog. IV." Comprenez : la Sibylle de Cumes dont Virgile se souvient dans l'églogue IV (des Bucoliques). De retour à la biquetterie, je suis allée regarder de plus près le passage en question. Le poète fait annoncer à la prêtresse le retour de l'âge d'or...
Première semaine de reprise des cours. Sauf que cette année, je n'ai pas l'impression de reprendre mes cours mais de débuter après vingt-deux ans de bons et loyaux services. La Réforme, malgré nos protestations, a tout chamboulé, promettant monts et merveilles. Mais en Langues et Culture de l'Antiquité, le bilan est amer.  Le Latin n'est plus une matière et est relégué à l'obscure catégorie " enseignement complémentaire ". Mes latinistes perdent la moitié ou le tiers de leurs heures. Comment fait-on pour inviter à un voyage antique une classe de 5ème en une heure hebdomadaire ? Nous n'allons quand même pas rester sur le rivage et regarder les bateaux tendre leur voilure vers le grand large ? Mes latinistes gagnent néanmoins le grand honneur de fermer le collège chaque soir puisque la pause méridienne est désormais d'une heure trente, incompressible et intouchable. A nous la case de 16h à 17h, dans le silence d'or enfin revenu.
Je m'en vais de ce pas , pour préparer un cours, ouvrir le fameux chant VI de l'Enéide où l'on croise à nouveau la Sibylle de Cumes qui guide Enée dans sa descente aux Enfers. Quand le printemps reviendra, je descendrai avec mes latinistes en Toscane, dans le Latium et en Campanie. Et j'aime déjà les pages de notre passé que nous y écrirons...

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Pavement du Duomo
Siena, août, 2016

mardi, 30 août 2016

Bures qui nippent

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Lucca, août, 2016

Je me souviens que pour prendre cette photo, mon 1,60 m était de trop. Que je me suis assise à même le sol. Que d'en-bas la basilica San Frediano était encore plus belle. Ossature bois, galerie d'arcs et rayon de soleil sur les bancs. Je me souviens que je me suis imprégnée du lieu avant de déclencher l'obturateur. Que je cherchais le bon angle quand un ecclésiastique a surgi du hors-champ comme un ange de sa boîte. Ses gestes n'étaient pas équivoques et sa soutane dans tous ses états. J'ai pris mon temps. Pour prendre la photo. Pour jouer mon rôle de diablesse effrontément face à la bure qui nie le droit de s'asseoir à même le sol. Si j'avais parlé italien couramment, je lui aurais demandé de m'indiquer l'arrêté divin suivant lequel il agissait.
Je me souviens qu'à l'entrée du Duomo de Sienne, les hommes en marcel n'étaient pas inquiétés. Mais que des tuniques post-opératoires étaient distribuées aux femmes en short et débardeur. Cachez-moi ces épaules que l'Eternel ne saurait voir. Ça t'avait fait rire - sur la tunique, tu avais torqué ta bretelle de sac à dos  - ça m'avait fait râler. Notre monde est étonnant : ici on couvre les femmes avec de hauts cris et là on les découvre avec de hauts cris.

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Siena, août 2016

 

lundi, 29 août 2016

Vertiges

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© Pili Vazquez,
Siena, août 2016

Je m'absente de mes îles pour une journée bien remplie. Trop remplie. Je crains même qu'elle soit un peu étroite aux entournures. Filer à Arras avant même le début du jour avec ma bonne étoile sur le siège arrière, penser à la mettre dans ma poche à l'arrivée, chercher un appartement pour mon fils, l'inscrire à la fac, détourner la conversation quand la secrétaire demandera la collante du Baccalauréat qu'il a égarée, prendre le temps de découvrir la ville puis rentrer. Se dire que ce soir, on pourra. Rire de la journée qui vient de s'écouler. A pleines dents. Ça doit être possible.

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© Pili Vazquez
Siena, août 2016

Nous voici de retour. Nous pouvons rire à pleines dents. Mon fils a accroché son blouson à la patère de son studio. D'ici quelques jours, il pourra glisser sa carte d'étudiant dans la poche de son blouson.

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05:25 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : toscane, siena, arras |  Facebook |

dimanche, 28 août 2016

Ailes et elles

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Siena, août 2016

Les jours se sont soudain accélérés. Ma fille est revenue de l'Océan. Mon fils de Tel Aviv. Ce sont autant de signes qui annoncent la presque fin de l'été. Déjà la rentrée chargée de lourdes réformes se profile et je renâcle à lui ouvrir la porte. Je le ferai quand je lui aurai trouvé une juste place. Aujourd'hui, je me dis que je ne vais peut-être pas avoir le temps de continuer à passer sur mes îles chaque jour et pourtant je n'imagine pas que mes jours puissent s'enchaîner sans ce détour quotidien.

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Siena, août 2016

Intranquillité que j'apaise à tire d'ailes avec l'impassibilité de cet ange qui surplombe le fourmillement humain,
et ces visages d'elles.

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© Pili Vazquez, Figures d'albâtre
Volterra, août 2016

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© Pili Vazquez, Envol de la pensée
Siena, août 2016

 

15:49 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : toscane, siena, aile, elle |  Facebook |

samedi, 27 août 2016

Ursinesque

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Siena, août 2016

 La part manquante
a profilé le contour
bien léché d'un ours

jeudi, 25 août 2016

Ritornare

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Siena, août 2016

Ça se savoure comme une madeleine cette canicule normande. Je garde certes les portes de la biquetterie fermées pour travailler au frais. Mais quand cet aprèm', j'ai lancé un espresso italiano dans ma cafetière Bialetti, j'ai jeté un coup d'oeil à G. qui voulait dire, on va le boire dehors ? Ni une, ni deux, nous nous sommes installés en pleine fournaise, avec contentement. C'était l'Italie retrouvée, pour lui l'Ombrie, pour moi la Toscane.

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© Pili Vazquez, Il cuore della città
Siena, août 2016

L'image qui est aussitôt remontée est celle de la Piazza del Campo, incurvée comme une vasque que n'inonderait plus que la lumière. Au fil des heures, la place prend même des allures de cadran solaire avec la Torre del Mangia dans le rôle du gnomon. Les touristes s'assoient dans son ombre et se décalent imperceptiblement, minute après minute, pour prolonger une fraîcheur toute relative.

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© Pili Vazquez, Sol y sombra
Siena, août 2016

Via Banchi di Sopra, une femme tourne le dos à cet exode nonchalant. Son pas se hâte lentement. Il la ramène chaque fin d'après-midi au même endroit. Ce jour-là, elle est en retard. Via dei Rossi, celles qu'elle rejoint sont toutes installées depuis une bonne heure. Elles sont déjà dans le vif d'un sujet. Elle n'a pas pris sa chaise pliante et le rebord de la fenêtre qui est déjà pris. Rosmunda, une fois sa cigarette finie, ira lui chercher un siège. A Sienne, il n'y a que les touristes pour s'asseoir à même le sol.

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© Pili Vazquez, Almodovaresque
Siena, août 2016

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mercredi, 24 août 2016

Fenêtres et drapés siennois

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Siena, août 2016

Les deux gardiennes de la Sala del Mappamondo du Palazzo Pubblico ont beaucoup de chance. Alors que d'autres de leurs consoeurs somnolent dans des salles obscures, elles règnent au milieu d'une salle lumineuse dédiée à deux fresques majeures de Simone Martini : d'un côté Guidoriccio da Fogliano all'assedio di Montemassi, de l'autre La Maesta. D'un côté un cavalier, de l'autre, une vierge à l'enfant. Entre les deux, un espace immense où nous nous sommes assises à même la dalle pour pouvoir observer longuement l'un puis l'autre chef d'oeuvre. Il suffisait pour cela, sans même nous lever, de pivoter de 160° en décollant légèrement les pieds du sol.

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Siena, août 2016

Donc confortablement installées, nous avons photographié les deux fresques dans leur ensemble. Mais très vite, j'ai cédé à la tentation de la fragmentation. Ici les fenêtres des cités, là un drapé. Je vous laisse imaginer ici le cavalier, là la vierge, en bas à droite.

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Siena, août 2016

De ce qui s'est passé quand nous nous sommes enfin levées, je pense que les gardiennes en parlent encore à leurs consoeurs des salles obscures avec perplexité. Mais la salle était si belle, elle-aussi...

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© Pili Vazquez, Souffle intérieur
Siena, août 2016

Tu as photographié ici un drapé qui sonnait bien à tes yeux. J'ai photographié là une fenêtre, paumes tendues.

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© Pili Vazquez, Mains en ogive
Siena, août 2016

mardi, 23 août 2016

Façades siennoises

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Siena, août 2016

Aux façades de Sienne qui dans les rues ne cessent de s'entrelacer

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Siena, août 2016

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Siena, août 2016

toscane, mur, siena

Siena, août 2016


Façades de face
front contre front
dans l'étroitesse des ruelles
façades de trois-quarts
dont la douceur écarte les incartades
Façades de profil
fil à fil dans les dédales
vous toutes
imbriquées les unes contre les autres

pierres et marbres côte à côte
vous dissimulez
au-dessus de nos têtes insouciantes
le jour qui passe
en un camaïeu terracotta
et quand l'oeil voit un nuage
il se dit qu'il se trompe

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Siena, août 2016

 

19:49 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : toscane, mur, siena, façade |  Facebook |

lundi, 15 août 2016

C'est sa fête !

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Cripta del Duomo, Sienne

Cela fait un peu plus de neuf ans que j'ai posé le pied sur ces îles et pas une seule fois je n'ai consacré un billet à l'assomption. Faut dire que je n'ai jamais compris comment ce mot pouvait désigner une quelconque élévation dans le ciel. Essayez de le dire à haute voix. Vous en aurez tellement plein la bouche de toutes ces consonnes aussi indigestes qu'une brochette de Chamallow passée au barbecue après les andouillettes que vous vous sentirez soudain d'humeur très terre à terre.
Mais cette année, c'est décidé, après avoir vilipendé tant et tant de fois Noël, je vais lui faire sa fête, à la vierge ! Et j'ai de quoi faire. Après dix jours passés en Toscane, à raison d'un ou deux musées par jour, ma photothèque est pleine de tableaux, fresques et mosaïques virginales, d'autant plus que P. n'y est pas allée de main morte. Avant de lancer le diaporama, je présente mes plus plates excuses aux passants sur ces îles. Nous n'avons pas eu la rigueur de photographier à chaque fois le cartel. Je ne suis donc pas en mesure de vous donner le nom des peintres, le titre des œuvres et toutes autres informations pertinentes qui figurent sur ces notices, habituellement. Seul reste le nom du lieu où ces œuvres sont exposées. Retour donc sur une vie en cinq épisodes avec sous-titres iconoclastes...

Episode 1 : L'annonciation

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Galleria degli Uffizi, Firenze
© Pili Vazquez

Commençons par une représentation somme toute très classique. Quand Gaby vient annoncer à Marie que l’Éternel l'a choisie pour son rejeton, qu'elle doit renoncer aux siestes amoureuses et qu'il faut qu'elle explique tout ça à son gars Jo, évidemment que la demoiselle a été épatée : ça me plaît bien, ce plan-là! répond-elle en levant sa main droite, délicatement. Comment pourrait-il en être autrement ?

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Galleria degli Uffizi, Firenze
© Pili Vazquez

Ah moins qu'elle n'ait reçu l'ange par ces mots : Oh, Gaby,  sérieusement, quoi, tu t'es vu dans ta tenue du dimanche? Fallait pas te mettre en frais comme ça pour moi ! Va donc rendre à ton patron son salut et dis-lui de faire sans moi ! S'il est si doué qu'on le rapporte, il doit même pouvoir se débrouiller tout seul. Sur ce, elle a repris son bouquin et s'est replongée dans la lecture. Ce jour-là, elle lisait le mythe de la naissance de Bacchus qui comme tout le monde le sait est né de la cuisse de Jupiter.

Episode 2 : L'heure de l'allaitement

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El Duomo, Siena
© Pili Vazquez

Sauf que le Patron a fait avec elle et que le rejeton était glouton.

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Chiesa San Michele, Lucca
©
Pili Vazquez

Episode 3 : Photomatons de la mère et du fils

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Torre del Mangia, Siena
© Pili Vazquez

Ça n'a pas dû être la joie tous les jours. Nuits blanches et cernes sous les yeux. Et cette manie que son fils a de toujours vouloir s'asseoir sur son genou gauche !

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Palazzo del Podesta, San Gimignano
© Pili Vazquez

Episode 4 : Scène de famille

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Crypta del Duomo, Siena
© Pili Vazquez

Sans parler des jours où ils se demandaient avec le gars Jo "A qui la faute ?". Ils se renvoyaient tous les trois la balle.

Episode 5 : Mater dolorosa

Au final, quand le petit trentenaire a enfin quitté le giron familial, ils ont cru qu'ils allaient enfin pouvoir couler des jours tranquilles. Ça n'a duré que trois ans. Y a sérieusement de quoi faire la gueule devant une vie pareille.

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Galleria degli Uffizi, Firenze
© Pili Vazquez

Tous mes remerciements vont à P. Sans ses photos, cette année encore, je n'aurais pu fêter l'assomption. Durant les jours toscans, j'ai réussi l'exploit de ne prendre aucune photo de la vierge. En effet, pendant que P.  prenait une fresque dans son ensemble ...

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Cripta del Duomo, Siena
© Pili Vazquez

... moi, je cédais à ma manie du fragment, ce qui me permettait de me poser des questions existentielles. Ah oui, au fait, qui donc s'est chargé d'enlever les clous ? Sans ce geste passer sous silence depuis deux mille ans, la descente de croix n'aurait pu avoir lieu. Mais je m'éloigne de mon sujet à moins que  je ne retombe sur mes pieds.

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Cripta del Duomo, Siena