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mardi, 17 mai 2022

Balade

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dans le soir qui tombe
un orage brise d'un coup sec le silence

immobile sur ma terrasse
j'entreprends de traverser mes îles
sur le sentier balisé "bal(l)ade"

voyage intérieur
fil tendu jusqu'aux bas-fonds lisboètes
et l'arbre solitaire sur une colline toscane

je me rends à l'évidence
les vies dansent moins souvent

mon clavier s'est enrayé
la balade ne sait plus être poème
où est mon aile

dimanche, 15 mai 2022

Y a pas à dire mais disons le quand même

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© Pili Vazquez

La pluie castagne la tôle
roulement de tambour dans le ciel
noir-acier déchiré par les éclairs
à la verticale à l'horizontale
je me suis mise à l'abri
entre les semis de courges et l'odeur de terre mouillée
au fond du cabanon dans le potager

Je l'ai échappé belle

Dire qu'il y a une heure
je semais le pourpier de Nicole le basilic de Marie
et mettais en terre les pieds de melon

Dire que ce matin
j'ai eu si chaud sous la combinaison apicole
apprendre
à enfumer les abeilles

à prélever les hausses dans un bourdonnement farouche
à désoperculer les cadres
à centrifuger
à mettre le miel à filtrer
(plus rapide à écrire qu'à faire)

Dire qu'hier
nous étions à un bal paysan au grand air
à écouter le récit de vélocipèdes partis sur des routes ensablées
à sentir la vie se redresser au rythme d'HK et les saltimbanks

Il n'y a pas à dire, ce fut un bon week-end
de ceux qui donnent envie de reprendre la route demain
avec un  regard qui porte loin
et un coeur qui bat un peu plus vite

mercredi, 16 février 2022

Renversement

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Il y a des jours
avec des craintes criantes, des peurs repues
et le pansement sur les pincements au coeur
peine à dissimuler le raffut et la pesanteur
ces jours-là
ça doit être un sacré bordel là haut
les planètes non alignées
l'univers aux abonnés absents

et soudain balagan

il y a des jours
aussi légers et silencieux
qu'une randonnée hivernale
sur les crêtes vosgiennes

lundi, 16 septembre 2019

Filer

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Raoul Dufy au MuMa, LeHavre

Cet été j'ai regardé filer
nos pas sur les chemins de randonnées
l'ipomée sur le bambou
tes mains sur mon dos
la clématite sur l'osier
mes lèvres sur ta peau
le cyclanthère sur le noisetier
les oies cendrées dans le ciel
les passants sur le front de mer
le cargo noir devant le soleil rouge
mais regarder filer les étoiles dans le ciel
j'ai oublié.
Mon voeu patientera jusqu'à l'été prochain.

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vendredi, 16 août 2019

Haut banc

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Mont Caroux, août 2019
© Pili Vazquez

Caminante, son tus huellas
el camino y nada más;
caminante, no hay camino,
se hace camino al andar.
Antonio Machado

Rentrée depuis peu de vacances et je n'ai pas trouvé le temps de m'exiler sur mes îles. Il y a eu tant à faire dans mon potager : relever les pieds de tomates allongés sur les graminées et les cyclanthères sur les herbes de Simone, redonner un peu d'espaces aux choux toscans, récolter les pois chiche, mettre en terre les salades d'hiver, les betteraves, le basilic ramenés des Coquets et les plantes récupérées dans les allées du jardin de Coursiana, faire cairn avec les pierres du cirque de Mourèze et les lauzes du cimetière de Bédarieux.
Il y a eu tant à faire et pourtant nous avons failli remettre à plus tard. La semaine dernière au rond point de l'aire du Larzac, à notre droite l'autoroute pour remonter patiemment vers le nord, à gauche une ultime indication vers le Haut Languedoc. J'ai dit chiche, on va à gauche, tu as dit, on fait reset et on recommence les vacances. Oh oui, recommençons les terres rouges du cirque des dolomites et les terres noires de bruyères du Mont Caroux, recommençons les genêts qui pétouillent à notre passage et les mouflons qui nous guettent en haut du chemin, recommençons à écouter la poésie, debout et  assises sur l'humus, les arbres et caetera, recommençons le vol des hérons cendrés au-dessus de la prairie fraichement coupée et nos cris sous les buis dévorés par la pyrale, recommençons les brins de cuisine, les vins de Faugères et les figures fantastiques sur les troncs creusés des châtaigners. Oui recommençons ce temps côte à côte où il est si simple d'être ici et maintenant.
On a fait risette et trop sagement nous nous sommes engagées sur l'autoroute.
Plus tard quand la rentrée sera passée et qu'il faudra se retrouver à nouveau entre quatre murs, que s'éloigneront les chaudes journées d'été passées dehors, quand l
es jours seront chargés inutilement comme sait si bien le faire l'éducation nationale, j'irai m' asseoir sur ce banc croisé lors de notre dernière rando comme on monte le long du hauban pour voir loin et retrouver le calme.

jeudi, 01 août 2019

Je reviens d'un pays

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Lectoure, juillet 2019

Je reviens d'un pays
où les collines revêtues de champ d'ails
se dévêtissent au petit matin

où les départementales jouent aux montagnes russes
entre les platanes
où les tournesols quand ils n'ont pas la tête trop lourde
vous fixent comme des insectes
où les cyprès ont un je-ne-sais-quoi de toscan
où l'on boit le soir un verre de rouge sous le marronnier

Dans ce pays-là
j'ai laissé
il y a si longtemps
un rideau de peupliers
une maison sans prétention
et l'insouciance d'une gamine
qui ne savait pas
qu'au-delà l'attendait
une ville étriquée
entre ses avenues tirées
au cordeau de la bien-pensance
où il faudrait bien grandir

Oui je reviens d'un pays
qu'on ne peut plier
et mettre dans sa poche
un mouchoir dessus

 

jeudi, 25 juillet 2019

Matin de canicule

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Lectoure, juillet 2019

J'ai ouvert chaque fenêtre
ai chassé la moiteur de la nuit
une bouffée de toi
les moustiques gorgés de nos peaux à nu

déjà les guêpes vont et viennent sous le poirier

j'ai ouvert chaque fenêtre
sont entrés les sept coups au clocher
l'ombre du muret
des éclats de fraicheur

déjà la lumière lèche le haut des façades

pas le temps de t'embrasser
j'ai pris le large dans la ruelle
qui donne sur  la place baignée de soleil
puis la rue à droite jusqu'à la boulangerie

le pain est encore dans le four

je me suis assise sur la terrasse
où l'on peut respirer le silence de la ville
j'ai bu un café ai ouvert mon carnet
sur la surface de ce jour

 

mercredi, 05 juin 2019

L'évidence

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© Pili Vazquez

Hier, dans le silence d'une salle d'attente, temps suspendu, j'ai tourné la dernière page de Mes bien chères sœurs. Jubilatoire ! Un manifeste pour les femmes d'hier, d'aujourd'hui et celles que nous aurons l'audace de devenir...
Comme il me fallait encore attendre, j'ai laissé s'imposer l'image du rocher de la plage de Varengeville. Oui c'est vrai, au début, je n'y ai vu que de la roche. Tu as dit, tu as vu le visage ? Et soudain c'était évident, la moitié d'un sourire, un nez découpé le long de l'arête et l'ombre d'un regard bienveillant. Fixement posé sur nous.
Reste à inventer la part manquante et à poursuivre, le sourire jusqu'aux oreilles, sans plus attendre.

mercredi, 17 avril 2019

Deux bouts

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Mercredi dernier, nouvelle journée "les filles à la plage" avec D. puis R., deux amies syriennes...

Face à la nonchalance des paquebots
l
e bord de mer sort de sa torpeur
château de cartes écroulé
les cabines se relèvent
une à une
malgré un vent entêtant

les passants sont rares
sur la promenade désertée
nous allons jusqu'Au-Bout-du-Monde
pas à pas D. raconte
elle a maintenant les mots pour le dire
les mois qui se sont écoulés
sa reconstruction malgré tout

chemin faisant
j'ai un autre bout du monde en tête
à une dizaine de milliers de kilomètres
et un peu moins d'un an de là
Valparaiso et la terre des grands pieds
ta paume contre ma paume

pour apprendre l'espagnol d'ici là
- je n'en connais que quelques mots
hasta la luna y vuelta-
j'ai trouvé des bottes de sept lieues
un cahier-journal
tu y remplis le vide qui est le mien
et Espaces, instants

Le es más fácil
a la clematis
enrollarse al nuevo arco
que a mi
encontrar camino en el nuevo idioma

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© Pili Vazquez

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mercredi, 24 octobre 2018

Huit reflets

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 Arradon, octobre 2018

Le reflet laiteux
de la lune s'allonge
sur le parc à huitres

 

vendredi, 17 août 2018

Proposition minéro-végétale

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La Bergerie, juillet 2018

Depuis notre retour de la Bergerie, j'ai dans la tête un projet circulaire pour mon potager. Il n'y tourne pas encore en rond mais s'invite souvent dans mes pensées. Faute de pouvoir le mettre tout de suite en oeuvre, ah la longue impatience, mon potager est à l'heure actuelle un joyeux fouillis organisé, j'imagine ce que je ferai une fois les dernières courges récoltées, juste avant les premières gelées : j'installerai un chemin de tuiles ondulées d'un autre pays que le mien;  je le remplirai de compost et de terre et finirai par une couche de feuilles mortes qui d'ici là joncheront le sol ; au printemps revenu, j'y déposerai semis, graines et plantes ; au centre, j'installerai une petite table et deux chaises et nous laisserons l'énergie de cette installation nous rejoindre. 
Reste à définir le tracé...
Cette nuit, il a beaucoup plu. Après mon premier café, je suis sortie en hâte et en quête de limaces mais mon potager me réservait une autre surprise : deux cucurbitacées s'étaient rejointes, formant un cercle ayant pour centre le cairn de jours clairs dans le Haut Languedoc. Nous partions tôt le matin, les sacs à dos remplis d'eau et de fruits secs. Au retour tu avais fait le vide, moi le plein de pierres du Saut de Vézole, des Gorges d'Héric, de l'Espinousette, de St Eutrope et du Mont Caroux.
Au milieu de ce tracé défini pendant que je dormais, j'ai pris mon second café et je m'y suis sentie bien.

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La Biquetterie, août 2018

09:08 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cairn |  Facebook |

lundi, 13 août 2018

Totems

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Totem et totem
Le Havre, août 2018
© Marie Nimier

En souvenir d'une journée que M. avait appelée "Les filles à la plage". Cela aurait pu être aussi "Jour de fête". Nous retrouvions deux amies syriennes, R. et D. installées depuis peu au Havre.

C'était déjà la limite du jour, quand nous sommes arrivées au bout du monde, fourbues. Nous venions de loin.

Du MuMa et ses créatures nées de l'écume et des rêves. De la côte que nous avions longée sous un ciel gris laiteux. De la digue que nous avions empruntée alors qu'une tempête mettait fin à ces jours de canicule : plus rieuses que les mouettes en troupeau sur les galets qui attendaient que le grain passe, si légères que les bourrasques qui faisaient gémir les mâts comme un choeur tragique auraient pu nous emporter mais nous avions tenu bon pour atteindre l'équilibre improbable d'un éléphant sur un homme. Du silence de l'église St Joseph où pour échapper quelques minutes au boucan du vent, alignées sur les strapontins nous avions improvisé un concert de vocalises entrecoupées de fous-rires. Du bistrot où nous nous étions réfugiées pendant qu'une pluie lourde recouvrait le bitume et que les éclairs découpaient les nuages.

Oui de tout cela nous venions, quand nous sommes arrivées au bout du monde, à la limite du jour.

La ville était loin derrière nous, le vent, la pluie et l'orage aussi. Il ne restait plus que la falaise abrupte, le roulement des galets sous l'écume et un colosse blanc.

Était-ce la tendresse contenue dans ses mains enveloppant celles de sa fille ou la force de son regard guettant ceux que la mer pourrait déposer sur le rivage mais nous nous sommes tues. Notre folle journée soudain suspendue. Il y avait dans cette crique quelque chose de sacré ou de profondément humain. Nous nous sommes assises et longtemps nous avons regardé au loin en silence, sous la protection du colosse blanc.
Avant de repartir, R. qui avait traversé montagnes et mers, bravé les dangers qui font le quotidien des migrants, a déposé une pierre sur un des cairns. A mon tour, j'ai déposé une pierre pour qu'un jour de grand vent, la sienne ne rejoigne pas les flots et ne s'éloigne de nos rives.

dimanche, 05 août 2018

Faire le plein

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Lectoure, juillet 2018
© Pili Vazquez

Rentrée depuis quelques jours mais accaparée par la biquetterie. A l'extérieur, le potager à déliseronner, les pieds de tomates à redresser pour qu'ils retrouvent la tête haute,  la terrasse à balayer. A l'intérieur, mes sacs à vider, la poussière à aspirer, les toiles à enlever, la toile à passer.
Aujourd'hui, j'ouvre enfin une journée vide. 
A l'heure où l'ombre du marronnier retrouvera un peu d'épaisseur, j'irai m'asseoir sur le banc. Je replierai mes jambes, les entourerai de mes bras, déposerai mon menton sur mes genoux et laisserai partir mon regard. Vers l'extérieur : la ligne d'horizon. Vers l'intérieur : ces jours clairs à tes côtés. Je ne sais quels fragments, quels éclats viendront s'asseoir à ma droite, à ma gauche. Il n'y aura sans doute pas assez de chaises. J'en rajouterai, ouvrirai un nouveau demi-cercle.
A ton retour,
tu viendras t'asseoir à mes côtés et nous regarderons la nuit allumer l'étoile du berger Vénus.

15:04 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : lectoure |  Facebook |

mercredi, 11 juillet 2018

Un vent-terre

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Pierre feuille
mais pas de ciseau pour raboter
les rainures du bois grisées par le plomb du soleil
Pierre feuille
où noter ce qu'il ne faudra pas oublier demain
la purée d'amande et la gelée de groseilles
les shorts et une polaire
dans la bergerie les nuits seront peut-être fraîches
les graines de chia le roiboos et le café
pour les premières heures de la journée et les suivantes aussi
des fruits secs mi-figue mi-datte
le laguiole et le notron
le sac à dos pour les gorges
les lampes frontales
si la lune n'éclaire pas suffisamment le sentier jusqu'à la yourte
Les métamorphoses, Lysistrata et les Boloss
à lire entre ombres et lumières

penser à faire aussi la liste de ce qu'on oubliera

samedi, 12 mai 2018

Fraternité

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Sur les rives de la Spree
Berlin, mai 2018

De retour d'une semaine à Berlin. Coupée des informations pendant autant de temps. Ce matin, au lever du jour, j'ai retrouvé mon potager et l'oiseau sur la plus haute branche. Accroché à mon poirier, mon transistor déversait la dérive du monde : Trump qui prétend postuler au Prix Nobel de la Paix, le plateau du Golan sillonné de roquettes et toujours et encore nos frontières fermées. J'ai posé la grelinette contre le tronc et suis allée chercher Destinée arbitraire sur une étagère...

Chant pour la belle saison, Robert Desnos (mort à Theresienstadt)

Rien ne ressemble plus à l'inspiration
Que l'ivresse d'une matinée de printemps,
Que le désir d'une femme.
Ne plus être soi, être chacun.
Poser ses pieds sur terre avec agilité.
Savourer l'air qu'on respire.

Je chante ce soir non ce que nous devons combattre
Mais ce que nous devons défendre.
Les plaisirs de la vie.
Le vin qu'on boit avec des camarades.
L'amour.
Le feu en hiver.
La rivière fraîche en été.
La viande et le pain de chaque repas.
Le refrain que l'on chante en marchant sur la route.
Le lit où l'on dort.
Le sommeil, sans réveils en sursaut, sans angoisse du lendemain.

Le loisir.
La liberté de changer de ciel.
Le sentiment de la dignité et beaucoup d'autres choses
Dont on ose refuser la possession aux hommes.

(...)

12:02 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : berlin, migrants |  Facebook |

mardi, 20 mars 2018

A la belle impérieuse

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15h, aujourd'hui comme tous les jours, c'est l'heure de la pause : dix petites minutes pour attraper en salle des profs mes deux  comparses, un café, une clope puis filer derrière le collège pour fumer la clope, boire le café et discuter avec mes deux comparses sous un froid rayon de soleil. Dix petites minutes pour recharger les batteries. Ce temps est d'autant plus sacré le mardi que j'ai déjà quatre heures de cours au compteur et qu'il m'en reste encore deux à faire. 

C'est ce moment-là précisément que choisit E. pour croiser mon chemin pressé.
- Madame, puis-je passer dans votre prochain cours pour faire un B.I.P. ?
Je suspends deux secondes mon vol pour lui dire oui avec plaisir, m'étonne à peine de la proposition, ne pense pas à lui demander avec quel prof il a préparé son B.I.P. - j'avais E. en français l'année dernière, je sais qu'il pratique cet exercice avec art : entrer dans une salle de cours, déclamer un poème puis ressortir - et allonge mon pas pour rattraper mes deux comparses.

15h10, je récupère mes latinistes 3ème. Au centre de mon cours, ce jour-là, le mot VIRTUS. On cherche ses traces dans la langue française : virtuel, vertu, virtuose... Traduisons-le rapidement par courage.
C'est ce moment-là précisément que choisit E. pour apparaître. Il ne me laisse pas le temps de remarquer qu'il a troqué son sweat contre une chemise blanche et un gilet de costume. Il dégage une tension que je ne lui connais pas. Je me recule pour lui laisser la place.

A la belle impérieuse de Victor Hugo

Je souris, le poème s'accorde bien avec le thème du Printemps des Poètes, Ardeur,

L'amour, panique
De la raison,
Se communique
Par le frisson.

Sa voix tremble, glissando ; en face la classe a suspendu son souffle,

Laissez-moi dire,
N'accordez rien.
Si je soupire,
Chantez, c'est bien.

Son visage reste obstinément tourné vers la droite,

Si je demeure,
Triste, à vos pieds,
Et si je pleure,
C'est bien, riez.

Je vois son coeur battre à tout rompre, côtes, chemise blanche et gilet...

Un homme semble
Souvent trompeur.
Mais si je tremble,
Belle, ayez peur.

Le dernier vers flotte encore dans l'air, qu'E. a déjà disparu. Tous applaudissent avec un sourire immense. Seule V., à ma droite, baisse la tête, avec cette grâce particulière propre aux personnages de Botticelli. L'un dit : incroyable, il a eu le courage de le faire ! C'est alors seulement que je comprends. Je dis : je me trompe ou on vient d'assister à une magnifique déclaration d'amour ? J'en reste époustouflée, E. venait d'imposer sa chance, serrer son bonheur et aller vers son risque.
Ce mardi devait filer comme un autre, il est devenu un jour de joie.

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mardi, 06 mars 2018

Art murs

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Gent, février 2018

Sous la griffe de graffitis
gaufrés ou agrafés
les murs ne sont plus plan-plan

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Lisbonne, février 2017
© Pili Vazquez

09:37 Publié dans BAL(L)ADE | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : mur |  Facebook |

dimanche, 04 mars 2018

Contraste

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Gent, février 2018

le matin
au passage du pont
elle est notre cadran solaire
sur la chute de ses reins le long de sa cuisse 
la ligne de partage de l'ombre et la lumière

tout le jour
battre le pavé gourd
doigts de gel
un café un chocolat
monter au beffroi
les langues du vent
un musée
longer les canaux figés
lipstick sur les lèvres
une troubadour une mort subite

le soir
nue au ponton
elle est là
la main en conque sur son oreille
elle écoute la ligne
de rencontre de la Lys et l'Escaut
l'écho de nos pas fourbus
mais tant de force au coeur

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mercredi, 01 novembre 2017

Trotteuse

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Nice, octobre 2017

quand je suis arrivée à Nice vendredi
les aiguilles de l'horloge du cours Saleya
indiquaient midi
pourtant il était dix-sept heures
quand je suis partie de Nice lundi
les aiguilles de l'horloge sur le quai de la gare
indiquaient midi
pourtant il était onze heures
entre ces deux pendules suspendues
au milieu du jour
qui se fichaient éperdument
du passage à l'heure d'hiver
quatre-vingt-dix-huit ans
l'anniversaire de ma grand-mère
née à l'autre bout du vingtième siècle
à Bône anciennement Hippone aujourd'hui Annaba
elle porte sur ses épaules
sa peau comme un châle de soie fine
a le verbe fleuri sans fioriture
mélange de français et judéo-arabe
peut soudain s'absenter de table
pour aller sur l'autre rive
de la Méditerranée
de sa mémoire

attraper une image indélébile
de sa mère morte à trente-quatre ans
et à son retour dire
entre deux rides
entre deux rires
vivons chaque seconde intensément
les heures se chargeront du reste

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mercredi, 27 septembre 2017

Illusion

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Nantes, octobre 2016

Une goutte de rosée
posée sous le réverbère
luciole d'automne

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dimanche, 03 septembre 2017

Dans l'entre deux

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Qui tu sais
Puy Mary, août 2017

Fenêtre ouverte sur le jardin les premières taches de rousseur
écran affichant mon cahier de texte
des cases qui se rempliront

plus tard au long des quarante quatre semaines à venir
pour l'heure je rembobine mes pensées
et les lacets des sentiers foulés cet été
GR 40 36 223 400
mis bout à bout on dirait un numéro de téléphone
à appeler en cas d'urgence les jours d'hiver sans lumière
un été à marcher
le regard qui porte loin devant
dans mon dos des fils s'entrelacent sur mon sac
comme autant de souvenirs du chemin parcouru
ensemble
un été à rencontrer des gens
qui n'ont pas laissé la vie les lasser
qui portent en eux des rêves si immenses
qu'ils ne risquent pas de les perdre de vue
un été à faire grandir les cairns
une pierre pour toi une pierre pour moi
un été que je garderai aimanté sur la porte de ma mémoire
quand demain je retrouverai
les murs fissurés de ma salle sous plafond amianté
pour essayer de faire naître dans le regard des gamins
qui chemineront avec moi cette année
des rêves si immenses
qu'ils ne risqueront pas de les perdre de vue


dimanche, 27 août 2017

à corps

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Aurillac, août 2017


sous l'ombrelle
raccord des corps
l'ombre d'elles

 

 

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mercredi, 16 août 2017

Biffure 24

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Danse ortique
Moulin de Ségrie, août 2017

dans la vallée
maintenant
les terres
faisaient tourner
des sculpture de prés
ça devenaient des gens

Mots rescapés des biffures de la page 15 de Joseph de Marie-Hélène Lafon

mardi, 15 août 2017

Biffure 23

anse st martin.jpg

Anse St-Martin, août 2017

Qui sait
son chemin ?
On perd
l'égarement

bleu nuit
regarder longtemps
la diagonale
des migrations
à l'intérieur
comme si...

Mots rescapés des biffures de la page 11 de La plage de Marie Nimier

lundi, 14 août 2017

Biffure 22

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GR 223, août 2017

idées
sur mes peurs à dos
mochila
compagnon de chaque instant

au petit matin repartir
l'ajuster
avec sérieux

Mots rescapés des biffures de la page 235 d'Immortelle randonnée de Jean-Christophe Ruffin

11:37 Publié dans BAL(L)ADE, BIFFURES, ROMAN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gr 223 |  Facebook |

mardi, 08 août 2017

La saveur du monde

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Sentier des granits, août 2017

Demain je reprends la route. Une nuit trois trains et un bus m'en séparent encore. A l'autre bout, ce sera le GR 223 de Les Pieux jusqu'à Cherbourg.  Ce soir, mon sac n'est pas fait. Tout au long de la journée, j'ai étalé dans mon bureau ce que j'ai prévu d'emporter : mon bol en bois, ta gourde, mon pantalon de rando, ton blouson de pluie, mon laguiole, ta lampe frontale, du pain noir, la tome entamée hier, des noix de cajou et des figues, ton duvet, un carnet et Marcher, éloge des chemins et de la lenteur.
J'aime l'impatience qui précède une longue marche. Je sais qu'elle me réveillera tôt demain matin. Qu'il fera peut-être même encore nuit. J'aurai bien le temps alors de remplir mon sac. C'est drôle que notre langue ne connaisse pas l'expression "remplir son sac" alors qu'elle a inventé "vider son sac".
Demain, quand mon sac sera plein, je trouverai encore un peu d'espace pour glisser  quelques instants partagés avec toi sur le GR 36, la semaine dernière. Il y aura celui-ci : nous venions d'arriver au gîte, tu te serais bien posée un peu mais déjà je t'entraînais sur le sentier des granits. L'une derrière l'autre, nous avons progressé dans les gorges de l'Orne. Le soleil était en train de retirer les derniers rayons du jour. Il m'arrivait d'avancer tout autant sur le chemin que dans mes pensées. Tu as vu que j'étais passée trop vite, que je n'avais pas remarqué. Tu as dis, tu as vu ? Quand tu marches, ton regard est aux aguets. Toujours. Sur la rive, des cairns. Veilleurs sur leur pierre plate, gardiens de la rivière. Equilibre improbable. Si tu n'avais pas été là, je ne me serais pas arrêtée, je n'aurais pas regroupé quelques galets sur une pierre laissée libre, je n'aurais pas élevé à mon tour un cairn. Un peu rectiligne, diras-tu. Plutôt élancé, rectifierai-je.

Demain, sur le GR 223, j'ouvrirai grand les yeux et les oreilles et laisserai la saveur du sentier se déposer sur mes lèvres.

 

dimanche, 30 juillet 2017

Les vaches noires

falaise des vaches noires

Falaise des vaches noires, juillet 2017

Aux vaches noires, il est deux heures. La mer se retire et laisse sur le sable ce qu'elle a soutiré à la falaise. Des fossiles, parsemés entre les coquillages et les crabes. Au dedans, c'est le reflux de souvenirs de gamine : moi et mon seau face à l'océan cherchant chapeaux chinois et étoiles de mer. Au-dehors, je ne porte en bandoulière que mon sac. Qu'à cela ne tienne, j'ouvre une poche extérieure, cela fera office de seau. Au début, je ramasse le moindre petit fragment porté des millénaires durant par les entrailles argileuses. Traces de vie entêtée. Après, c'est comme pour la cueillette des chanterelles à l'automne, je deviens de plus en plus exigeante magnanime. Je recherche l'ammonite et ces coques qui à force de sédimentation ont acquis la légèreté de la feuille dans l'herbier.
Le retour se fait le long du rivage, pieds-nus dans l'eau. Je ne sais plus si c'est la mer ou mon sac qui sent les embruns. Mes pensées oscillent.  Que ferai-je de ces fragments qui ont su résister aussi bien aux tempêtes qu'aux jours étals ? Les alignerai-je à tous vents sur le rebord de ma fenêtre ou sous l'ombre calme du cerisier ?

lundi, 17 juillet 2017

Rendez-vous avec un arbre (2)

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Ravin de Corbeuf, juillet 2017

Sur la route de Blanhac, cet espace étonnamment horizontal, stries bleutées sur arêtes saillantes. Après la yourte toute en rondeur, la table sous l'ombre du tilleul, les chemins qui s'enlacent, les entrelacs de nos murmures. Et avant des Nuits de rêve sous la voie lactée et bouton de rose.
Espace horizontal. Sillons désertiques. Les géologues l'appellent "badlands", mauvaises terres. Pourtant un arbre pousse, agile dans l'argile. J'ai l'impression de le connaître, de l'avoir déjà côtoyé ailleurs. Je descends quelques strates plus bas dans ma mémoire. Au dedans, un arbre toscan. Au dehors, le vent qui nous porte et mon regard qui reprend la route.

 

lundi, 12 juin 2017

Eroder les obstacles

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Geste premier : choisir un lieu dans le jardin en vue d'y déposer Ganesh. Il y a sans doute là quelque superstition.
Geste second : libérer le lieu choisi des herbes adventices, liseron et mouron, épargner l'oxalis.
Geste troisième : s'étonner que le lieu choisi recèle une pierre plate.

mercredi, 10 mai 2017

Chaîne de véloulipo (4)

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Pour poursuivre cette nouvelle semaine sereinement, une nouvelle chaîne de véloulipo. Le mode d'emploi se lit sur mon billet Véloulipo.  

Rayon de soleil

Ou de vélo, souvent

Tu m'emmènes au loin

 

Tu m’emmènes au loin

Chemin tu avances plus vite

Plus vite que mes efforts

 

Plus vite que mes efforts

L'impatience ne vaincra pas

Bonjour souplesse

 

Bonjour souplesse

Je compte les syllabes

Le nez au vent

 

Le nez au vent

Pour trouver l'inspiration

Vélo sans parole.


Les auteurs des haïkus par ordre d'apparition sont : Angeline R., Eduardo B., Dom C.,  la tenancière de ces lieux et Angéline R.